Un capitaine. Une vigie inattendue mais également quelque peu inutile, comme cette photo d’ailleurs. Hormis peut-être par sa légère incongruité. Hormis peut-être par l’attitude si juste de ce canidé, de ce chien. En alerte. Le regard vif, aux aguets. Il semble même soupçonneux. Il est fort bien campé sur ses pattes avant. Prêt peut-être même à bondir si nécessaire. Silencieux mais si présent par sa si juste attitude qu’il rend le passant plus attentif à ce chien et au lieu qu’il garde, alors même qu’il n’aboie pas. Pourtant le son résonne sans même qu’il n’existe. L’aboiement s’immisce au travers du silence, de l’absence. L’aboiement se devine au travers de sa silhouette stable et si vivante. Tout ouvre à l’imaginaire. Oh capitaine, mon capitaine, ne vois-tu rien venir ? Je ne sais si le soleil poudroie. Et il n’y a pas d’herbe. Capitaine ô capitaine, sois sage et tiens-toi plus tranquille, tu réclamais le soir point n’est nécessité à bondir. Ce silence habité au travers de la fenêtre est un tableau étrange et juste, mais un véritable tableau cependant. Juste là, en bord de fenêtre, un navire et son mousse canin.
Fin de promenade un jour à la météo sans réelle identité : il ne pleut pas, mais cela pourrait, aurait pu, pleuvra peut-être. Marche sans prétention, pour le plaisir de marcher, et non pour photographier. Au détour d’une rue qui ramène à la voiture, croiser ce chien. Dépasser la vision, puis s’arrêter. Car on est surpris par le tableau, cadre dans le cadre, en plus. Un instantané à saisir ? Ou pas. Brève réflexion, courte hésitation. Léger demi-tour, revenir rapidement sur ses pas. La main désire saisir le smartphone pour enregistrer ce tableau, le fixer. Et profiter du naturel cadre dans le cadre. Ouvrir le petit sac maison fabriqué pour les petites marches. La main fouille dedans en évitant les lunettes de soleil — inutiles ce jour —. Là, sentir dans la main la carte d’identité qui glisse contre la coque du smartphone. Puis elle émerge munie du modeste appareil photo. Appareil néanmoins parfait pour une photo prise à la volée. Parfait pour céder au plaisir de croquer l’instant. Parfait pour saisir une légère curiosité offerte par les hasards de l’existence. Penser aux tableaux peints un peu kitsch à s’offrir, tableaux qui mettent en scène des animaux avec des attitudes humaines, des vêtements. Chat façon François premier, chien à la manière d’un dandy. Cadrer rapidement, fugitivement sans tout contrôler simplement pour saisir, inscrire quelque peu ce capitaine, cet instant. Puis rentrer tranquillement chez soi.
content de te ré-accueillir !
Grand merci François. Contente de revenir également.
J’adopte cette définition d’un appareil modeste : « Appareil néanmoins parfait pour une photo prise à la volée. Parfait pour céder au plaisir de croquer l’instant. Parfait pour saisir une légère curiosité offerte par les hasards de l’existence » .
Merci aussi pour « Ce silence habité au travers de la fenêtre ». qui m’emmène bien au delà de la fenêtre.
Extrêmement touchée. Merci 🙏
La photo est superbe et mérite tout à fait la désignation de tableau, et votre texte lui donne un sens tout particulier. Très émouvant ! Merci, Cécile, pour cette lecture.
Merci beaucoup pour votre passage ainsi que pour le joli mot déposé.