Aller! où va tout ce qui a de la chair, du sang et du souffle, à voix basse, enténébré d’oripeaux et de parfums
Aller! où va toute créature vers le seuil d’un orient renouvelé, un lieu de table rase, un espace intérieur élevé où reposer sa nuque
Et faire jaillir dans cet écart l’ambre de ce qui a encore à être, à devenir, à pousser comme cri
Et repousser toute pensée de certitude loin dans le caniveau
Plus bas, plus bas, c’est de la terre que cela monte, des cicatrices labourées et des sillons creusés où affleure un dedans rougi
Et s’arracher de là, de cette glaise, de ces terres noircies de cendres, des herbes sèches qui griffent la peau et des pierreries illusoires
Plus loin, plus loin, vers le seuil d’un autre seuil où se tiennent des portes closes enserrant la promesse d’un devenir
Plus loin, plus loin, là où les écorchés vifs espèrent encore un havre de paix après des cheminements balayés de peurs d’inquiétudes et d’absences
Et que d’un battement de paupière la vision de l’œil se recrée, un monde se recrée, donnant à l’obscurité un peu de lumière
Et dans cette liturgie d’images qui se froissent et se défroissent tenter de lire dans les augures la métamorphose espérée
Et même si l’incertain reste le guide d’une pensée trébuchante, le halo noir d’un réel qui enserre, une auréole de cendre durcie, aller!
Et au-delà une cavalcade de songes où prend forme le vertige, une mélodie où se déploie un thème infime à l’écart
Et au-delà des rhizomes s’ébauchent, des sentes se dessinent, des chaînes se libèrent, ciseaux et burins s’acharnent pour créer ce qui doit l’être et dont on ne sait rien encore
Et au-delà, et au-delà, des images à l’affût un peu froissées, des chapelets de pensées abandonnées sacrifiées sur l’autel du temps qui a passé
Et au-delà, au-delà, ce qui cherche à éclore, une langue d’aurore sur la pierre, une langue apposée sur la peau, une partition naissante à déchiffrer
Se hâter, se hâter! oh les leurres de l’image où nouer les leurres de la langue, un invisible à rendre visible
Et propulser le regard loin des opacités dans une crique une anse une matrice
Se hâter, se hâter! quelque chose jaillit, poussée par le milieu, comme une source haute, cela pousse et déborde
Se hâter face devant lignes de fuite en devenir
beaucoup d’obscurité, d’opacité, de terres noircies et de cendres dans ce texte
je l’ai lu comme une libération du carcan, terre compacte et dure…
et puis comme une quête de lumière afin que le chant monte
« une langue d’aurore sur la pierre, une langue apposée sur la peau, une partition naissante à déchiffrer ». Particulièrement touchée par la poésie de ces mots, porteurs d’espoir. « Une langue d’aurore sur la pierre » Magnifique. Merci Solange.