#boost #06 | méprise

C’est Kafka qui parle à quelqu’un qui l’appelle Bernard, devant Max qui sait qu’il est Franz et qui lui demande après que l’autre est parti : pourquoi n’as-tu pas dit que tu étais Franz, mais parce que je suis Bernard. Si on te prend pour quelqu’un d’autre ne démens pas. Dans la vitrine du chapelier de la place il y a plein de têtes à chapeau sans visage et un miroir avec quelqu’un que je prends pour une autre ; dans l’autoportrait sur fond vert avec du rose, un pigeon écrasé et un garçon mal embouché mais là, c’est moi. Ne sors pas sans tête il a dit après au lieu de chapeau. Quand je lui raconte que je suis ma sœur, il dit, Oh comme elle te ressemble. Souvent Je reconnais quelqu’un que je ne connais pas. L’autre jour j’ai embrassé le dentiste dans le hall du théâtre je l’avais pris pour la sœur de Bernard. Et le nom du visage qui ne te revient pas. Et ceux de l’allée qui n’ont pas de visage. Sur la photographie tombale quelqu’un a écrasé une fleur sans doute à cause du prénom Rose.

A propos de Nathalie Holt

A commencé en peinture, a vécu de théâtre et d’opéra, des années de scénographie plus tard ne photographie pas que son lit, tient son journal en images, écrit et marche chaque jour a publié un peu pour aller au bout d’un geste ( Ils tombaient ) ( Averses) https://www.amazon.fr/stores/author/B09LD7R2KY . Écrit pour lire.

15 commentaires à propos de “#boost #06 | méprise”

  1. Toujours cette écriture et ce regard décalé qui prend la proposition pour la sublimer. J’ai pensé théâtre, personnages, Kafka, justesse des mots, des images qui nous perdent et nous embarquent dans ce labyrinthe de visages, merci Nathalie.

  2. Un texte dans lequel on zigzague entre les visages, les personnes, les mots.
    J’aime beaucoup ‘Si on te prend pour quelqu’un d’autre ne démens pas’ et ‘Ne sors pas sans tête’.
    Et la dernière phrase; elle cogne.
    Merci.

  3. Délicieux, très Kafka, avec la pointe cruauté qu’il faut. Très beau, ces visages entrapercus, confondus. L’anecdote de Kafka (que je situerai dorénavant devant une vitrine de chapelier) m’a fait songer à cette blague juive rapportée par Freud. Pourquoi me dis tu que tu vas à Cracovie pour que je croie que tu vas à Lemberg alors que tu vas à Cracovie ? Je crois qu’il le traite même de menteur. Il aurait fallu qu’il mente pour dire la vérité.
    « Quand je lui raconte que je suis ma sœur, il dit, Oh comme elle te ressemble »

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