Ton cri est dans ton ventre tu ne sais pas bien où. Il ne te fait pas mal c’est juste une présence, tu sais qu’il est par là en dessous des poumons, plus dans les bas morceaux, dans les abats, les tripes dans le foie, les rognons, au milieu de la panse. Dans tes entrailles. Ton cri n’est pas un son, ton cri, il est liquide. Ton cri ce sont les larmes qui ne sortent de toi que quand tu es couchée, comme ça sur le côté, les jambes repliées, les cuisses qui poussent le cri caché là dans ton ventre, qui appuient et qui pressent, qui poussent et qui repoussent qui font sortir le cri en litres d’eau salée, de l’eau salée, de l’eau de mer. Dans la même position que pour donner la vie tu expulses ton cri. L’eau amère d’être non-mère, expulsée de tes yeux qui refusent de voir au-delà de ce vide.
Parfois aussi ton cri qui sort est rouge sang, il a le goût du fer. Ton cri sort de tes mains, de tes jointures qui cognent, qui frappent et qui voudraient tant casser cette muraille de leurs dos à tous ceux qui te tournent le dos, ce mur de dos tournés qui t’enferment dans cette cage, dans cette grotte, ce réduit, cette cellule, ce placard qu’ils construisent de leurs corps, lourds, larges et uniformes quand ils te tournent le dos. Mais quand tu veux cogner ils sont déjà bien loin ils t’ont tourné le dos et ils ont disparu, alors tu cognes quand même, dans tout ce que tu trouves, dans une pierre, dans un arbre, dans un mur de parpaings ou bien un mur de planches. Tu cognes et de tes mains sort le cri libéré par ta peau déchirée qui ne fait plus obstacle au cri qui veut sortir. Ton cri qui habite là, dans ton ventre, dans tes tripes, tu ne sais pas bien où. Mais tu sais que parfois quand tu as bien cogné que tes mains sont inertes qu’elles ne peuvent plus bouger, quand tu n’as plus de larmes et que tes yeux sont secs à devoir les fermer, parfois les mots arrivent, des mots comme des cris alors tu les écris
Codicille :
Toujours Mow, celle de LVME, celle des peurs, celle de tenir tête à. Toujours creuser en elle pour mieux faire connaissance. Avec de tels outils que ceux de trouvés chez Boost, on creuse des personnages d’une belle épaisseur. Merci
Ho mais quelle mise en oeuvre de la souffrance de femme qui prend aux tripes. C’ est rare de lire cette souffrance-là. « Dans la même position que pour donner la vie tu expulses ton cri. L’eau amère d’être non-mère, expulsée de tes yeux qui refusent de voir au-delà de ce vide. » merci pour ce partage
Merci à toi pour la lecture. Ça fait un moment que je tourne autour de cette personnage et les trois dernières propositions de Boost m’ont vraiment bien aidée à la découvrir telle qu’elle sera sûrement dans les textes que j’aimerais lui construire
Texte magnifique Juliette, ce cri qui sort du corps et se transforme en mots, en écrits, merci à toi pour tout cela.
Grand merci Clarence, mais j’ai eu l’aide des mots eux-mêmes et de la rime cri-écris
« Ton cri ce sont les larmes qui ne sortent de toi que quand tu es couchée »
on te lit sans s’arrêter, tu t’adresses si fort à nous… tu nous attires dans la grotte avec le goût du cri rouge sang, avec le goût du fer
(et encore ce « tu » chez toi…. une forme qui te rassure…)
Merci pour ma lecture sans arrêter, ça rassure que ça marche. Je commence maintenant à bien connaître Mow et il me semble que c’est un personnage qui pourrait avoir de l’avenir