Au coin de la rue et du faubourg se tient une armurerie – elle a été mise à sac un jour il me semble bien du temps des gilets jaunes (le gilet, cet accessoire du trois-pièces habillé comme de la valetaille) ou était-ce celle du coin de la rue Vivienne ? – le goût des armes, des objets tranchants, du mal – du mal – avancer en âge, varices aux mollets et sens qui s’émoussent – le mal ou alors le crabe ou encore Aloïs était le prénom du docteur en médecine, il donne son nom à la maladie : comme à certaines rues on donne le nom de ceux (plutôt que celles) qui y vécurent (Vivienne vient du Vivien Louis adjoint au maire propriétaire – du Palais Royal aux grands boulevards) – s’armer et montrer au public qui l’aime une tronçonneuse et en rire parce que la blague est bonne – vraiment bonne (ce n’en est pas une) – je me suis demandé ce que pensent de ce père ses enfants – ou de ne plus pouvoir mettre ses chaussettes debout comme dans le film sur le Larzac, ne plus pouvoir s’essuyer le derrière, ne plus contrôler ses sphincters : la limite de ne plus pouvoir se supporter se tenir parler penser rêver – se supprimer ne plus pouvoir – le type racontait les tortures qu’il avait subies pendant des mois, asservi à un radiateur (réfère à Lauriston, cette rue dans le 16 où du côté du 93, on torturait en veux-tu en voilà – pendant la guerre précédente et mondiale – (de duc de – Bernard (Jean-Jacques) Law (petit neveu du type du système financier qui a porté ce nom), maréchal de France (Pondichéry, 1768; Paris le 11 Juin 1826) probablement territoire de Nouvelle-Zélande sud et ici cesser)) et il disait parfaitement reconnaître la voix de son tortionnaire (celui-ci comme de juste nie tout en bloc ainsi que donald 47 ou le gros russe) – (ou alors de ne plus) voir, sentir, goûter faire l’amour (sans la moindre de ne plus pouvoir boire d’alcool) (pour les hommes est-ce un défaut plus délicat ? ou une manière habile de refuser ? le mal de crâne, la fatigue intempestive, le manque de plaisir et de joie – trop d’humeurs sans doute – la bandaison, papa (disait le poète) ça ne se commande pas – le film où la jeune femme ouvre le ventre d’un sanglier, pendu par les pattes de derrière à la branche robuste d’un arbre, pour y plonger les bras et en extraire les viscères (Borgo peut-être bien – en Corse) – les rites d’initiation, ceux des classes préparatoires, les humiliations, se faire uriner dessus, chier dessus, le corps, les haut-le-cœur, les tortures sûrement – cet autre film où on veut faire avouer au jeune type musulman qui n’a rien fait qu’il a quand même violé une fille (en Inde) – il en mourra, des coups infligés par l’héroïne (Santosh si je me souviens) : en arriver à ces états-là et n’en pas pouvoir sortir, être pris par ces forces, possédé, annihilé comme être humain – humain – parce que ceux (et celles, moins nombreuses sûrement) qui infligent ces violences ne sont pas moins humains cependant pourtant malgré tout ou ont-ils (elles) perdu jusqu’au qualificatif (si oui comment se débarrasser de ces types ? Et pourquoi ? ) – des violences sans doute dont on se saurait capable, il suffirait de presque rien/peut-être dix années de moins – ou encore de ne plus savoir dire je t’aime – de ne plus l’éprouver – ne plus le ressentir – je me souviens on l’avait retrouvée elle vaquait dans les rues sans savoir qui elle était, elle était entré dans un café de hasard elle portait un sac à main dans lequel on a trouvé ce numéro de téléphone et ils sont arrivés pour la rechercher, son mari et son fils et elle était là, perdue – on s’est demandé un moment si on pouvait, comme ça, ouvrir ce sac et violer un peu de son intimité – elle ne répondait pas à nos questions, on lui a demandé si on pouvait voir dans le sac, elle n’a rien dit mutique peut-être – les yeux perdus ce n’était pas la première fois, ils avaient l’air embêtés : « elle n’a pas été trop grossière ? parce que des fois… » : ça, oui – il faudrait pouvoir en finir, se rapprocher comme disent les gens de loi d’une association (Quelques jours au printemps par exemple) – il y avait ça dans le rêve : des pastilles blanches comme des pilules d’homéopathie que je ramassai penché vers le sol et un type me flanquait un coup de pied et je disais me relevant et me mesurant à lui c’est mon à mon âme que tu en veux c’est elle que tu as blessée – qui était-ce ? je tenais un poignard volé dans cette armurerie sans doute que j’enfonçais sous ses côtes remontant vers le cœur fouaillant ce n’est pas un rêve seulement une écriture de celui-ci – c’est ainsi que les sentiments meurent ces atrocités réalisées avec le sourire et même le rire – cette jubilation dans le sordide, n’y pas céder – un vieil homme qui perd la vie pour l’ôter à un dictateur (il y en a tant) est-ce qu’elle a une telle valeur qu’on ne puisse la laisser se perdre ainsi ? La brader ? Non, moi ces trucs-là je ne les écoute pas, disait mon ami de bar, les informations ce qui se passe au Moyen-Orient tout ça – ça ne m’intéresse pas – n’en est-on pas comptable pourtant ? ne sont-ils pas de la même eau ?
je ne l'avais pas écrit à chaque fois,mais je l'ai gommé à chacune de ses apparitions, il n'y en avait que peu - il n'en faut pas avoir disait un prélat tu te rappelles ?
Complètement touchée par ton texte Piero, cette violence, armes, tortures, à dire, à redire pour ne pas oublier, pour s’en rendre compte, qui parlent d’hier, d’aujourd’hui, de la folie des hommes et comment pouvons nous en arriver à être comme cela, si désespérés, si cruels ? Merci cher ami, bonne nuit.
@Clarence Massiani : c’est un privilège de te compter parmi les lectrices (et -teurs soyons justes) de mes textes – j’en suis honoré – d’autant que j’ai eu quelques difficultés à poster ce texte – merci à toi très chère Clarence (et bonne résidence…)
mauvais rêves au pluriel. texte difficile, courageux. qui trouve le moyen d’avoir les mots les plus durs et que ça passe, ça passe parce qu’on est déjà plus là, on est déjà ailleurs, on se laisse glisser au gré des sonorités, on ferait croire au jeu, mais on y revient, l’air de ne pas y toucher, on donne le prénom d’une maladie, et le nom des rues parlent elles aussi de violence, on se souvient de films, on sait ce dont on veut parler, ce qu’on veut mettre sur le tapis, on le fait, en vrac, sans mâcher le travail à personne, aussi brut que la vie l’est, l’est en ce moment. on se sent comptable. moi aussi.
@véronique m : affronter. Merci à toi (courageux,je ne crois pas, mais difficile oui)(encore merci véronique)