Ne pas aller où vont les êtres en errance, les attributs les plus vils de ce monde, où vont les terreurs, les horreurs et toute l’inhumanité. Ne pas aller où vont la folie et l’incompréhension, ne pas aller au-devant des champs de ruines, de miasmes, de pensées maudites et de cloaque. Ne pas aller vers la mort avant l’heure, vers les renoncements, le dégout et les désintérêts, ne pas me laisser emporter par les voix assourdissantes qui prônent le vrai du faux, le sans but, le sans-cœur, le sans-abri, le sans foi ni loi, ne pas laisser infuser dans mes fragiles oreilles les vents contraires à mes croyances ô combien naïves peut-être mais qui me permettent de me tenir à flots. Ne pas me laisser me morfondre dans les ténèbres humaines n’accordant plus de crédit à l’invisible, ni à l’amour ni à l’autre, ne pas me laisser me noyer dans les fleuves impurs de la matérialité pure-dure et sans âme où tout est juste bon à acheter et à être marchandé, ne pas me laisser distraire par le tordu le mesquin le cynique le gratuit l’avidité la cupidité la jalousie l’imbécillité et les plus que toutes peurs.
Aller où vont les pas qui dessinent des empreintes des traces des mouvements bien définis, aller où vont les oiseaux tournoyant dans les ciels rougeoyants, où vont les vagues des océans flux et reflux pour mieux adoucir, polir et attendrir tout ce qu’elles effleurent, ici-bas. Aller où vont les êtres de cœurs, les pensées les plus hautes, les regards les plus simples, les esprits sincères, les percées lumineuses, aller où vont les fragiles poésies, les mots caresses, les gestes qui relient, aller dans les tréfonds de l’âme, au centre de nos lucidités, au meilleur de ce pour quoi nous sommes bien nés.
Plus loin où les espaces seraient parsemés de fleurs sauvages entrelaçant les hautes herbes verdoyantes, plus loin où la terre se reflèterait dans les cieux nous ouvrant grands les yeux, plus loin où les dieux n’auraient plus besoin d’exister car, sans formes, ni icônes, ils seraient logés juste dans nos creux, plus loin où nous saisirons que nous sommes éphémères et qu’il serait enfin bon de se taire, plus loin où la bonté des chiens deviendrait universelle, plus loin où nous marcherons sur les couleurs arc-en-ciel, plus loin où les animaux n’auraient envie de disparaître dans les forêts.
Et au-delà, dedans, dessus, dessous, à côté, à la limite de, sur la berge, en équilibre, plus loin que, me laisser être dépassée, emportée, vécue, traversée, transcendée, fulgurance et envolée poétique.
commencer par le « ne pas aller », une forme de résistance dans ce paragraphe un peu heurté qui se cherche
et puis ce retour vers la nature, la poésie, « les gestes qui relient », le passage au « nous » dans le fragment 3, jusqu’à te retrouver sur la même berge
(merci Clarence)