
ST1
Ils sont avant la terre et puis aussi après, du tout en haut des arbres jusqu’au ras des pâquerettes. Et aussi les racines, dans le dedans de la terre. Les plantes sortent de la terre elles y naissent puis grandissent, perdent leurs feuilles et leurs fruits, cassent, meurent, tombent sur la terre. Les animaux se déplacent, grattent, mangent, se reproduisent, creusent, défèquent, meurent et tombent sur la terre. Vers, taupes, mulots, oiseaux, lapins, bactéries et microbes, ils seront bientôt terre et puis nous avec eux. Le vent amène, ramène, emmène, apporte, et l’eau fait la même chose, les feuilles, branches, les radeaux de toutes sortes apportent la matière, de quoi nourrir, construire et puis fonder la terre, faire en accéléré le travail de la terre, la décomposition qui va la composer. Juste rajouter du temps et tout finira terre. Une fois née, la terre vit, elle est terre, n’est plus seulement terreau. La terre se fait, se défait, elle abrite, elle nourrit, dépérit et puis elle s’appauvrit, elle vieillit, devient pâle jusqu’au gris, devient poussière, emmenée par le vent et puis l’eau de la pluie qui la prend par la main, l’emmène dans les rigoles, les ruisseaux et les fleuves, la terre n’est jamais boue, la boue c’est la poussière mélangée avec l’eau, la poussière est terre morte
ST2
Langue devenue terre, atterrée du traitement réservé à la terre
Couleurs toute de terre, terre de Sienne, de la sienne, de la tienne, de la mienne on a chacun sa terre même qui n’a pas de terres
Tous les bruns sont de terre, tous sortis de terre, bruits de bottes et de bombes, les faites redevenir terre, et le plus vite possible
Terre mais pas poussière, terre nourricière, terre-mère, terre et mère, ça rime, ça va ensemble, terre et mère sont des mots qui vont très bien ensemble
Terre et mer, opposition de façade, tout prend vie sur l’estran pour la terre et la mer
Terrer, éther, éternité, enterrer, déterrer
Terre à terre, bouche à bouche
À ras de terre, juste la Terre rien de ce qui fait la terre qui se décomposera et refera la terre, le terreau, le bébé terre encore plein de repas pas encore dégustés, pas encore digérés, pas encore enterrés
ST3
Pieds sur terre, terre à terre
Ne pas diviser les terres, travailler la terre, vivre de la terre, dans la terre, creuser la terre jusqu’après ma mort pour couvrir ton corps d’or et de lumière, creuser pour planter, pour trouver, pour pendre à la terre ce qui nous intéresse ne lui laisser que le reste, creuser pour enterrer les déchets et les morts, creuser, pelle, pelleteuse, remonter la terre descendue dans la pente
Travailler la terre, à quatre pattes dans la terre, les deux mains, les deux genoux, les deux pieds, les bouts des pieds, les orteils, alors au moins six pattes et pas quatre, doigts des pieds, doigts des mains, dix et dix et les genoux, les vingt-deux bouts de nous plantés fiers dans la terre, nos racines d’êtres humains à planter dans la terre pour qu’elle redevienne terre
ST4
Terre ! : grand cri de soulagement hurlé depuis la mer, parce que sur mer on reste encore des étrangers, même quand on y flotte bien
Codicille :
Facile et difficile d’écrire sur la terre quand on a de la terre et juste de la terre juste après le parquet et les carreaux de terre cuite, ni goudron ni béton rien d’autre que de la terre. Trop à dire, à choisir, besoin d’y revenir, mais important d’ouvrir ce chantier de la terre
Et lien humus-humain à développer encore
Super lecture merci !
Vais y revenir !!
Merci pour la lecture et encore mieux si super !
A bientôt pour le revenir !
Merci pour la saturation de tes textes avec le mot terre. ça donne envie de les dire à voix haute, de le rouler sous la langue
– sur qu’est-ce qui fait terre pour soi ?
st 1 j’aime cette présence du vivant sous toutes ses formes. « Juste rajouter du temps et tout finira terre. » C’est fort et ça rejoint l’idée de la terre mère / mer
st2 touchée aussi par : « on a chacun sa terre même qui n’a pas de terres ». Comme c’est vrai ! ça donne envie de creuser – pas fait exprès
Creuser, malgré le jeu de mots. C’est souvent mon problème avec les propositions des ateliers, chacune suffirait pour tenir une année et écrire au moins un livre. Mais terre, je la garde peut-être encore plus précieusement que les autres…