
Écrire sur la terre ?
Écrire sur la terre, quelle drôle d’idée, mais je suis né en mars, je suis « poisson », mon élément c’est l’eau, c’est scientifique, les planètes ont parlé, il faut l’accepter.
ST1/ L’eau qui coule du robinet, puis qui goutte en rythme, qui s’écoule, qui s’évade, qui descend dans la plaine, fond des montagnes, lisse les algues vertes, ondoie sur le gravier, brille de mille feux au soleil, cache dans de noires profondeurs les disparus de la rivière, qui étanche notre votre soif, coule de notre corps, tombe du ciel et lave le monde.
ST2/ L’eau des vagues, de mer et du ciel, salis par la terre, fragile comme un filet, terrible comme un tsunami, tenu dans une gourde, immense à perdre la vue, plate ou à rouleaux, douce ou acide, rapide ou morte, l’eau des mots, l’eau des morts, Charon attend sur sa barque, Poséidon entend des sirènes, Amphitrite à préparer des moules.
ST3/ J’ai regardé les perches, les anguilles et les tanches, j’ai vu leur trésor, leur beauté exotique ; je me suis trempé les pieds dans l’eau froide et marron de la manche ; j’ai observé la surface des étangs à la recherche de la vie ; j’ai nagé jusqu’au frisson dans l’eau turquoise de la Méditerranée , le goût du tuba dans la bouche et un masque sur le nez ; j’ai bu l’eau du robinet au goût chloré, bu des eaux gazeuses en bouteilles, j’ai reçu de l’eau en perfusion, j’ai mis des gouttes d’eau dans les yeux de mes enfants, j’ai mis ma fille toute habillée sous la douche, je le regrette encore; j’ai lavé du linge, de la vaisselle, une moto, une voiture, un corps, des corps, je me suis lavé, on m’a lavé, j’ai senti les pesticides dans des mares au bord des champs, j’ai senti l’eau sale des égouts, je suis tombé dans l’eau froide des lacs de montagnes, j’ai vu un homme qui se noyait, il apparaissait, disparaissait comme un bouchon de pêche, la mer hésitait à prendre sa vie, elle l’a épargné, j’ai vu mon enfant se déshydraté si vite que son visage a commencé à s’effacer pour nous montrer sa tête de mort.
ST4/ L’eau : Ce bien essentiel est gratuit, il est utilisé sans vergogne par ceux qui ont la chance d’habiter dans un pays de pluie, le consommateur n’attache de la valeur qu’aux biens qui ont un prix, peut-être qu’un jour il changera, mais d’ici là, de l’eau aura coulé sous les ponts.
Un beau contrepoint et comme l’eau est toujours quelque part en contact avec la terre
transposition osée et réussie !
et si seulement « l’eau pouvait laver le monde » comme tu l’écris !