oh mon amour
mon amour mon amour
mon amour
est-ce qu’il ne reste que ces mots, les seuls dont je veux
mon amour, je
ne veux plus qu’une plainte,
de la maison sortie presque courant, expulsée, il fait froid tu sais tu n’entends, il fait froid allée retrouvée où, face à la plaine face à la peine face à la ronde plaine verte en bord interne de la ville. sortie presqu’en courant pas au bout du monde au bord de la plaine verte ; l’ouverture où je passais hier encore pour t’acheter… peu importe. venue voir, m’y arrêter — l’espace où j’étais de longtemps appelée —, que quelque chose s’arrête.
cette très improbable plaine dans ces marges de la ville qui se cherchent. dis-moi n’étais-je déjà assez seule que je doive que tu doives t’en aller. je t’en vais. froid aux dents, plainte retenue à bout de bras, je chasse tes mots. qui parlera sans toi ? j’arrive, d’un œil ne vois passante sur ma droite mendiante dans des sacs innombrables et sur la route un homme capuché encapuchonné arrête les voitures se tourne vers moi, hé ! hé ! c’est qu’il le veut, que je lui donne, à lui, quelque chose, je fais un petit geste du bout de ma main du bout de mes doigts au bout de mon bras du bout de ma peine de la plaine je l’écarte discrètement, tourne alors résolument le dos à la route aux palissades, ce que je voulais avec toi regarder : la plaine et ne vois rien mon amour la plaine est verte mouillée surplombée d’un ciel de nuages, liserée tout au fond d’une ligne de jeunes arbres nus, bordée enfin d’un mur qui épouse ses courbes recouvert de peintures, de tags colorés, une plaine de pelouses parcourue d’un colimaçon que dessinent de savants surélèvements de terrains soutenus de remblais bas où quelques rares se sont assis, au hasard des cercles, figures esseulées venues ici se poser malgré le froid les nuages, se poser dans la plaine spiralée où j’avais vu l’été des familles installées. à ton enterrement hier j’étais mal habillée. je l’ai vu sur la photo que la famille m’a envoyée. que veux-tu : tu n’étais pas là. à droite les rues que j’empruntais hier ou avant-hier pour la première fois, qui filent au loin comme je filais pour t’acheter… je ne peux rester là adossée presqu’à la mendiante, de l’extérieur de l’onde je fais le tour, à rebours, c’est que je rentre, déjà, je longe des arbres aux chaussettes blanches qui pianotent vaillamment l’allée, levant les yeux je vois de l’un les innombrables bras de cris dressés vers le ciel, je ne pleure pas j’avance, je rentre, sur une pierre est écrit justice en lettres capitales, je passe, je n’ai jamais été très forte pour les descriptions, un homme pris dans la spirale danse un casque sur les oreilles, de la spirale un autre sort des sacs au bout des bras, la traverse, sort-il lui aussi des magasins où hier ou avant-hier j’allais, longeant la plaine du parc du ninove, 50°50’58.4″N 4°20’11.6″E. j’entends encore de l’amour à dire et à te dire. j’entends encore ton amour dire.
(codicille: #rebours à nouveau (à nouveau comme avant, ça me revient, déjà, avant, puisque c’est une reprise des atelier tiers Livre, ça me reprend) reprise par ce sentiment d’aller à rebours de la consigne. #nomination #lieu l’épreuve de ma résistance foncière à la nomination d’un lieu (plus loin, face au nom propre). résistance invaincue, qui cherche ses termes de remplacement, en trouve de provisoires ici mais non quelconques. il fallait ce recours à l’expulsion de soi pour y parvenir. l’établissement de cette fiction. #blowup impossible à relire. insérer peut-être encore la première impression eue lorsque j’y étais du parc de Blow Up. j’ai pris des photos, toutes ratées, trop sombre, je n’y arrivais pas.
circonstances : il y avait des deuils, du deuil, des larmes qui ne sortaient pas et j’avais eu besoin, j’ai eu envie de risquer l’ouverture d’un espace à moi, espace que trop prise par de multiples obligations, je n’arrivais pas à me créer. la raison pour laquelle je me suis ré-inscrite à l’atelier, pour l’aventure boost. et alors, tout de suite, l’envie d’une complainte d’amour, tout de suite, le désir de… débusquer le deuil à déplorer, de débusquer un deuil à déplorer. le deuil déploré. me servant artificiellement ce que je venais de vivre.)
magnifique élan se cognant au deuil, ou comme s’il y avait un bout du monde en chacun de nous, ou sa menace
merci christophe de ton passage, de tes mots. élan qui se cogne au deuil ou s’en expulse pour voir d’autrement, depuis le bord de soi ou du monde
oui, je note tout au long du texte les efforts de description comme des retours du monde, le maillage des annotations permettant de se déprendre des extrémités et reconstituer un environnement, un lieu de vie
ha oui christophe c’est étonnamment bien cela aussi, bien vu, bien dit , merci
(en réponse à votre dernier commentaire, sur les retours du monde, )
ha oui christophe c’est étonnamment bien cela aussi, bien vu, bien dit !
contente de te retrouver ici… j’allais dire, dans la résistance !
mais on aime justement cette langue
merci Françoise de ton accueil ! ha ha, résistance, tu m’as fait rire/sourire !! ça résiste bien en effet et les difficultés que je rencontre sont réelles. je te lis dès que j’ai grimpé la montagne tarkos…