À travers les yeux du masque de l’âge de raison, il se voit en noir et blanc. Frontal. Crocs en avant, un chien bondit. Arrière-plan flou d’obscurité.
À travers les yeux du masque de carnaval, il se voit en noir et blanc. Contre-plongée vibrante. Ils sont quatre. Tout est sombre : la scène, leurs cheveux corbeaux, leurs longs manteaux.
À travers les yeux du masque de l’âge des possibles, il se voit en noir et blanc. Surexposition. La serveuse, ses longs cheveux sombres noués en chignon comme cheminée. Sa robe sombre aussi. Et son sourire. Son sourire.
À travers les yeux du masque des frappes chirurgicales, il se voit en couleurs, un peu passées. Là-bas, au milieu de l’avenue, le blindé s’est immobilisé. Contre la roue avant droite, un paquet de vêtements. La tête du gosse pastèque.
À travers les yeux du masque de la respectabilité, il se voit en couleurs. Très nettes. Un sommier clair et un matelas recouvert d’un drap rouge. Froissée, une couette du même rouge. Derrière, au centre du mur blanc, une fenêtre à barreaudage ouverte. Ouverte sur la nuit d’une forêt de feuillus. Le flash y rebondit.
À travers les yeux du masque de la sagesse, il se voit en noir et blanc. Cadrage bancal, écrasé, en plongée. Sur le goudron maculé de neige et de boue, un vieillard rampe. Ses vêtements et ses jambes en loques. Son visage dévoré par sa bouche.
À travers les yeux du masque mortuaire, il se voit en sépia. Des hommes en haillons, une dizaine. Ils extraient des pelletées d’un tas de terre. À leurs pieds, un trou. Du trou, des mains essayent de se dresser. Au loin, la grisaille. Des bouleaux s’y agrippent.
ah oui ! j’aime ce masque de raison (et ce qu’on voit à travers bien sûr)