autobiographies #13 | du je partout

Je suis de Sormery
Enfant j’y habite avec mes deux parents
Je suis de Sormery
Un jour mon sale père meurt, il nous laisse seules, seules
Je suis de Sormery
Ma blanche mère pleure, pleure, elle ne voit rien devant
Je suis de Sormery
Je ne ris plus, j’étudie, je ne suis pas veule
Je suis de Sormery
Ma passion c’est l’anglais, pas peur de Trafalgar
Je suis de Sormery
Sûre, sage, solitaire, fantasque, finaude et fatale
Je suis de Sormery
Chaque jour dans mes cheveux, je noue un foulard
Je suis de Sormery
Agitée, sens dessus dessous, suis en cavale
Je suis de Sormery
Fuir loin loin de ma mère et des Solimariens
Ma fille Africaine, enfin ma famille ailleurs
New-York, Moscou, Kinshasa, Lille et Bali
Oh my God, en voyage, je ne compte pas les heures
Et pourtant, et pourtant, sans cesse, j’y reviens,
Finalement, finalement j’y suis si bien
Oui, je suis de Sormery

En 1927, mes parents Maurice et Berthe décident de quitter l’Indochine et de revenir vivre en France, ils revendent la brasserie que le grand père Alfred avait créé et surtout la fameuse marque portant notre nom « La Bière Hommel », ils laissent derrière eux 65 ans d’histoire familiale, j’ai 17 ans et suis ravie de découvrir Paris, je m’imagine déjà porter une gaine, une robe élégante et des chaussures bicolore: noir/beige, à bouts ronds, avec des brides en T qui découvrent le pied et des talons en bobine qui nous affine. J’ai déjà prévenu ma mère qu’à notre arrivée je cours chez Mr Antoine pour qu’il me coupe les cheveux à la garçonne façon Coco Chanel. Et aussi je passerais mes soirées au Théâtre des Champs Élysées à écouter Sydney Bechet, à admirer Joséphine Baker et quand elle entonnera la petite Tonkinoise, je frémirais follement alors il faudra me retenir avec force pour que je ne saute pas sur la scène pour chanter avec elle à gorge déployée :
« C’est moi qui suis sa petite/ Son Anana, son Anana, son Anammite
Je suis vive, je suis charmante/ Comme un p’tit z’oiseau qui chante
Il m’appelle sa p’tite bourgeoise/ Sa Tonkiki, sa Tonkiki, sa Tonkinoise
D’autres lui font les doux yeux/ Mais c’est moi qu’il aime le mieux »

L’amour hétéronormatif alors pour moi c’est fini, c’est du passé, je n’y crois plus, j’en veux plus je te dis, moi les hommes je les déteste. C’est comme ça; ça ne se répare pas un cœur brisé; non ta gueule, pas ébréché, éclaté en mille morceaux je te dis, t’as jamais vu? tu veux que je te montre?
Alors maintenant pour moi le genre métrosexuel, c’est aussitôt apparu déjà disparu, bon débarras, casse-toi connard, et ne t’avise pas de trainer par chez moi car avec mon gang de sorcières on va te les couper tes couilles, on va te la taillader ta bite, te la fixer en serre tête, te la mettre dans le nez, dans les oreilles ou dans ta bouche qui pue. T’as compris, gros? Ta gueule je te dis, dégage avec tes potes, tes cousins, tes frères, ton père et nique ta mère !

A propos de Cécile Bouillot

Bonjour je suis comédienne. Je développe également des projets vidéos dans lesquels je filme les gens autour d'une même question. J'écris des poèmes de rue a partir de phrases récoltées dans la rue, j'aime m'amuser avec différents jeux d'écriture, j'écris régulièrement depuis deux ans. Acte 2 Scène 2. Chaine Youtube : https://www.youtube.com/user/cecilebouillot

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