le rebond de la balle sur la terre battue du cours ; le choc du caoutchouc sur les cordes tendues de la raquette ; toutes les têtes du même côté ; le sifflement de la petite sphère à travers l’air ; toutes les têtes de l’autre côté ; le bruit du caoutchouc sur la terre brique ; la fulgurance du jaune fluo qui echappe au joueur en blanc ; l’exclamation enflée de la foule ; un son entre oh et ah ; une voix neutre et mécanique énonce un nombre et une lettre ; la foule en blanc tourne la tête ; choc, caoutchouc, jaune, fusée, siflle, ahanne, tournent les têtes, rebond, oh, ah, raquette, lunettes de soleil, casquettes, rebond, l’autre côté, filet ; la voix neutre et mécanique dit « avantage » et un nom compliqué ; le soleil fait éclater le blanc ; « Let! » ; rebond, rebond, rebond, lance vers le haut, tape ; la petite sphère jaune s’envole, une paire de jambes court, une chaussure blanche glisse ; trace de glissade sur la terre rouge ; la sphère jaune frôle la ligne blanche et s’écrase plus loin ; les poitrines haletent ; égalité
l’odeur de la poussière de craie ; le parquet usé ; les portes battantes au petit hublot rond où se répandent en sens contraire le flot des étudiants qui sortent, le flot des étudiants qui entrent ; les bancs de bois lustré qui s’étagent en arrondi ; la salle s’appelle un amphithéâtre ; le tableau qu’on dit noir, qui est vert et immense ; l’homme debout devant, cheveux corvins, lunettes rondes ; le son clair de sa voix ; sa main qui décrit des figures dans l’air ; ses doigts serrés sur une craie ; son dos pendant qu’il écrit au tableau ; la transpiration des jeunes corps ; le bruit du frottement des blue jeans sur le vernis des bancs ; un éternuement ; l’attention de l’assistance, palpable ; un brouhaha, des rires ; un tableau encore plus immense au-dessus de l’autre ; un tableau de peinture ; il représente des figures féminines éthérées et drapées, dans des poses à la fois rigides et langoureuses ; au milieu d’elles, un éros ailé et un jeune dieu nu ; la muse de droite porte une lyre ; les autres murs sont ronds ; s’y ouvrent des niches ; s’y accrochent des moulures ; quelques statues aussi ; le plafond est voûté, avec une verrière ; l’amphithéâtre Richelieu ; la Sorbonne ; Paris
quatre étages en colimaçon ; des marches déformées par le temps ; la porte d’entrée ouvre directement dans la pièce principale ; la lettre L ; la forme de cette lettre ; la pièce a cette forme ; la porte est au bout du petit côté du L ; dans le creux du L se trouve la cuisine ; à droite en entrant ; une autre porte juste en face à l’entrée ; intérieure ; cette porte intérieure est dans le dos du L ; elle donne sur un petit couloir avec la salle de bain à gauche ; la chambre à droite ; trois fenêtres à égale distance ; dans la chambre ; dans la pièce principale au bout du grand côté du L ; dans la cuisine ; en entrant on ne voit aucune fenêtre ; pour cela il faut soit ouvrir la porte de la cuisine, soit avancer pour arriver à l’angle de la pièce en L ; les trois fenêtres donnent sur une cour ; la cour est grise ; le ciel est bas ; la salle de bain est aveugle ; la porte d’entrée claque ; la pièce principale est principalement occupée par un piano ; le piano est un quart de queue ; une table ovale se tasse près de l’entrée ; le plateau de la table est en marbre veiné ; les pieds de la table sont arqués, en métal noir, décorés de motifs végétaux ; une table bistrot ; les chaises ont des pieds assortis ; elles sont garnies de coussins ronds ; les coussins sont blanc crème ; leur couleur rappelle celle du plateau de la table ; une lampe est posée sur le piano ; elle a un abat-jour en tissu, uni, sans fioritures ; les murs sont tapissés d’étagères pleines de livres ; à droite de la porte du couloir se trouve un canapé ; en face du canapé, la télévision ; entre les deux, la fenêtre ; les toits par la fenêtre sont de zinc ; un fauteuil à bascule en bois clair ; au-dessus du canapé, une reproduction d’un tableau de Franz Marc ; le cheval est bleu ; le paysage est fauve ; de l’autre côté du mur se trouve la chambre ; sur le mur côté chambre, un autre cadre est suspendu ; il représente la mer ; le lit est double ; il prend presque toute la largeur de la pièce ; il n’y a pas beaucoup de place pour le bureau et la machine à écrire ; la penderie est dans un placard ; les murs sont blancs ; quelqu’un est assis sur le tabouret du piano ; quelqu’un d’autre dans le fauteuil à bascule ; la lampe est allumée ; le diamètre du cercle de lumière sur le piano est plus grand que celui de l’abat-jour
Super ces 3 moments 3 lieux. Drôlement vivants. Beaucoup de plaisir à les lire
Merci Louise !