1- quartier Saint-Cyrien
porte d’entrée vitrage opaque, juste à côté le portail coulissant du garage, la fente large pour le courrier avec son clapet au claquement sec, la vigne vierge maintenant qui a colonisé tout le renfoncement du mur et mange l’encadrement de la porte, la caméra disparue presque dans la végétation et qui scrute et se met en alerte quand on sonne, son œil rond et opaque qui vous immobilise au pied de la porte, l’attente pour qu’on identifie le visiteur depuis là-haut au premier étage, les pas qu’on entend dans l’escalier quand quelqu’un vient ouvrir,
2- le Bic à Rimouski
la porte blanche en partie vitrée protégée par l’auvent qui la surplombe, les buissons de chaque côté qui isolent à peine l’entrée, et pendant les mois d’hiver la neige accumulée dont on perçoit avant de sortir la hauteur à travers le vitrage, la neige tombée dans la nuit mêlée à celle projetée par la lame des chasse-neige, la grande pelle qui permet de se frayer à la main un chemin depuis le seuil jusqu’à la rue, ce passage qu’il faut creuser sur quelques mètres en sortant de la maison chaude et douillette avant d’atteindre la chaussée déblayée depuis l’aube par les engins, les mêmes gestes à recommencer un peu plus loin sur le parking pour libérer la voiture de sa couverture blanche et défaire la congère gelée barrant l’accès à la rue, une mise en train aux premières lueurs du jour qui réveille agréablement le corps ou fait un peu violence c’est selon la nuit passée,
3- route de Toulouse
une grosse porte en fer couleur verte, sûrement pas un beau vert non, avec un petit carré de verre épais dans la partie haute, quand on sonne la première fois une tête au regard fiévreux vient s’écraser contre la vitre, les cheveux hirsutes les dents qui manquent, un rire sardonique pour vous accueillir mais muet, le visage hagard qui s’inscrit dans l’ouverture vitrée à quelques centimètres de vos yeux, l’envie de s’en aller loin tout ça, et puis chaque jour le visage réapparaît quand on sonne, pas toujours le même et parfois pas un mais deux visages collés à la vitre pour vous observer, l’impact et l’envie de s’en aller se sont estompés mais reste toujours le sentiment de passer le seuil pour un autre monde plus noir et plus trouble,
… elles ont bien du rythme ces portes-là. Merci pour ce partage.
Et merci pour ce petit commentaire (de plus, à propos du rythme, ce qui me touche beaucoup)