On arrivait à bord d’une dauphine blanche au bout d’un chemin de terre en pente que, déjà, on pouvait l’apercevoir à travers les espaces des gros madriers en bois peints en vert. Il avait été planté, enfin on supposait que quelqu’un, le propriétaire de la demeure que nous louions à l’année pour les vacances, avait eu cette volonté de le voir dès qu’il ouvrirait les volets de la chambre du bas. Peut être y avait-il installé son bureau. Il était là presque devant l’ouverture, gênant parfois la fermeture des volets. On pouvait presque, dans sa dernière année, caresser ses feuilles composées de minuscules petits bâtonnets vert-gris depuis le premier étage où nous avions nos chambres. C’était un très beau mimosa. Nous ne l’avions pas encore vu en fleur parce que la maison n’ayant pas de chauffage, nous nous y rendions qu’aux beaux jours. Un été, je jouais dans le jardin et comme souvent peuvent faire les jeunes enfants, je cassais une branche de cet arbre pour aller la coller contre un mur proche et la faire tenir avec un monticule de terre grattée aux alentours, pour créer un petit univers à moi. L’hiver qui suivit fût rude et ce climat ne correspond pas trop à ces arbres qui viennent du sud de l’Australie et donc habitués à des climats connaissant rarement les gelées. A notre prochaine venue nous fûmes tristes de constater que l’arbre était mort. Il ne restait qu’un tronc grisâtre dépourvu de son ramage. Mais le plus surprenant c’est que la branche cassée avait pris racine et montrait quelques liserés de verdure.
Et d’années en années, nous avons vu grandir cette branche, devenir arbre penché essayant de s’éloigner du mur, jusqu’au moment où nous arrêtâmes de louer cette maison.
Mais pour l’heure je n’avais pas encore vu cet arbre, dont j’avais sauvé le devenir, en fleur. J’ai croisé ces bouquets de pompons jaunes, très odorants, d’abord chez des fleuristes et puis dans le sud, ces énormes boules jaunes dans les jardins, offrant toute la lumière qu’ils peuvent, parfumant les rues et indiquant par leur explosion, l‘agrandissement des jours. Et je ne peux m’empêcher au détour d’une promenade quand j’en croise un, de m’arrêter, fermer les yeux, respirer son essence, être transportée, à genoux par terre, les mains pleines de terre, puis avant de reprendre ma route, tendre la main et caresser ses feuilles si je peux.