autobiographies #03 | des arbres comme écriture

Avec insolence je prospérais au centre du jardin, au centre de sa vie de femme. Elle m’avait choisi par souvenir, en hommage à ces rares jours heureux, lorsqu’elle allait voir le carnaval de Nice. Par confiance aussi à mon espèce, annonçant toujours, immuablement le retour proche du printemps, seule certitude dans un monde désenchanté de petite fille.

C’était l’année de mes six ans, comme les précédentes, je tenais promesse. Au creux du vert-tendre de mon feuillage des milliers de soleils explosaient comme des pop-corn, légers, délicats, parfumés. Ce printemps-là pourtant ma vie fit naufrage. Dans la nuit, il s’est approché, le mauvais temps. J’ai frémis, j’ai senti son souffle fort et avec une force inouïe il m’a giflé, secoué violemment pour me soumettre. Jeune et encore trop fragile, je n’ai pu résister à ses coup de butoir. J’ai cédé.

Une partie de moi gisait au sol lorsqu’elle a ouvert  ses volets bleus. Sans un mot, elle s’est approchée pied nus, doucement a caressé mon corps brisé, elle m’a entouré de ses bras, je sentais son corps sangloter, ses mains se crisper sur ma peau. J’étais si faible que je ne pouvais rien pour elle. Avec délicatesse elle a ramassé sur le sol boueux une branches fleurie y a enfouie sa tête et respiré profondément mon odeur. C’est là, à ce moment précis, devant son corps mi nu, souillé par la boue, dans ses larmes, dans sa voix ferme que j’ai su. Je survivrai. Avec elle, comme elle, je sortirai de cette tourmente plus fort. Malgré les blessures de la vie, l’âme ne périt pas.

A propos de HELENE OURTIES

Je suis née à Marseille en 1956, et m’installe à Montpellier en 1974. Mes choix d’expression artistique sont la photographie et l’écriture. Ma curiosité est vaste. J’aime l’art, la poésie, le beau, le monde, la vie. J’aime les paysages, les nuages, les vagues, les forêts, les oiseaux. J’aime la nature (même humaine). La photographie ouvre au monde qui nous entoure. Le côté fugace de la prise de vue aiguise notre regard, le corps est en éveil, aux aguets de l’insolite, de la moindre beauté que l’œil perçoit comme telle. Mes images expriment ma singularité au plus près de ma sensibilité, dans toute sa complexité, âpreté ou tendresse. J’accompagne mes images de poésies-brèves, qui font écho à l’émotion vécue, alors parfois un livre sort des limbes. J'aime les histoires qui nous emmènent en voyage. Ma quête artistique est de vous inviter à me suivre. https://ourtieshelene.wixsite.com/ourtieshelene/blog

2 commentaires à propos de “autobiographies #03 | des arbres comme écriture”

  1. J’aime beaucoup les mimosas… et votre troisième paragraphe. Courage, j’en suis au même stade que vous, je viens de publier mon texte sur l’arbre ce matin.

  2. joli texte. J’adorais le mimosa jusqu’à venir habiter à proximité de Villefranche sur saône, m’apercevoir que c’était la fleur des conscrits et que mon mari y était allergique. Plus de mimosa chez moi…qui d’ailleurs sèche trop vite dans les intérieurs trop secs.