des montagnes d’ordures sur les trottoirs les feux épars (chasse aux rats ou feux de joie) de gens qui chantent en se tenant la main sous le métro aérien
une mine sans charbon ni or
de grandes pièces de bœuf à dos d’homme qu’on hale
les caniches et les chevaux dans le trou qui fait cirque en attendant les bulldozers
un grand singe sur l’affiche hérissée de building ; il rêve
les rats chaussés de pointes ou le masque de Fantômas sur l’écran bombé du téléviseur qui neige
Sarah Kofman toute petite et ronchon dans le couloir de Tolbiac qui se donnera la mort après qu’elle aura écrit la hache qui fend le père en deux
« Comme le désir sexuel la mémoire ne s’arrête jamais. Elle apparie les morts aux vivants les êtres réels aux imaginaires le rêve à l’histoire ».
Flux saisit d’arrêts brusques; flux suspendu au bout des langues. Images et noms réinventés en images et mouvements. Pièces ou fragments vrais de toutes pièces recomposés avec les trous. Patchwork en pièces de temps…
Histoire qui s’éclaire au noir des fosses qu’on ouvre.
« dis que ça a existé. »
les survivants vieillis (édentés) qui entrechoquent leurs mémoires (en silence)
les cours du faubourg Saint Antoine aux accents d’Europe centrale avec l’odeur de colle à bois et d’essence de térébenthine
une cabine sur la place d’un village de France où quelqu’un passe un appel vers New York et le bruit des pièces qui tombent
un jeu de murmure à l’oreille; phrase qu’on se passe et qui laissent sur la route des lettres ou des mots comme on laisse tomber des dents.
les bouches et les têtes qui ont des trous
le boucher qui passe avec son camion réfrigéré
le cinéma de mairie où image et son comme dans une parodie de Godard se désaccordent si bien
la religieuse qui agrafe ton arcade sourcilière
la cour où se brise ta première dent
le visage de Nicolas penché sur le cithare
les corps au hasard de la nuit chez : « chez pas qui »
la cuite allemande: coca, bière, whisky
les frites de quatre heures du matin au bistrot des taxis juste en face de la morgue
un train de nuit et tu chantes avec lui
le solex tombé en panne rue saint jacques et redescendre en roue libre
Bacon devant La Coupole
Alice la serveuse trop grosse pour passer le miroir
le Brooklyn Bridge avec l’homme sur le banc conforment à l’image
…apparie les morts aux vivants, les êtres réels aux imaginaires, le rêve à l’histoire…
De quoi rêve le singe ?
les corps squelettiques dans les geôles
…les morts aux vivants…( je possède des morts je les ai tous abandonnés Requiem Rilke)
les corps paria décharnés avec le virus qui descend du singe
les folles de mai
Woyzeck qui plonge sa tête dans le seau pour retrouver la lune ou le couteau dans l’eau
Angela Davis qui parle du Chili et tu crois qu’elle t’a devinée dans la foule
« mon mal vient de plus loin « (Phèdre)
les femmes échassiers entre deux portes
l’anpe de la rue Pigalle
les six étages sans ascenseur
les forains du boulevard d’Anvers à Clichy : la femme au boa ou celle à barbe ; le tatoué qui soulève les passants comme des poids ; les poupées trop grandes et les carabines à air comprimé ; les pommes d’amour qui s’étoilent aux néons de l’entrée interdite et la voix qui fait réclame pour des corps ordinaires
le polyptyque de l’agneau mystique et la jeune fille à la perle
la guerre est la santé des états qui jouxte Les dialogues aporétiques dans les salles où l’on fume encore
la nuit d’un théâtre antique où point le jour
un cheval du marché de noël de Cracovie qui n’a rien vu ni ne se souviens puisqu’il est un cheval : de bois
le nez de Pinocchio qui s’allonge
le nez de Cléopâtre qui s’efface avec les accents circonflexes
…tu n’en reviendras pas … Déjà vous n’êtes plus qu’un mot d’or sur nos places Déjà le souvenir de vos amours s’efface Déjà vous n’êtes plus que pour… poèmes ou chansons qui passent
la mort qui se fait une place dans la maison
le rêve récurrent du mort toujours vivant mais mort
la Bastille en liesse sous la pluie
la Bastille en noir sous le soleil d’hiver
« pleure pas grosse bête tu vas chez Noblet » dans sa vitrine gelée
le corps qui se souvient
OUI
une fugue en boucle de la mort (lait noir de l’aube nous le buvons)
la litanie des lits
Antigone ou Hamlet?
la douleur qu’on croyait pour toujours alors qu’on n’aime plus
hyper salutaire toujours ces lancées, et ça appelle l’oral…
quel bel exercice! je comprends mieux en lisant les autres
ah ! dans mes stars j’avais oublié angela davis. elle trouve place chez vous, elle y est bien. je croyais n’avoir rien compris à la consigne, en vous lisant je me dis que si, peut-être. et aussi que si on mettait bout à bout toutes ces images flash, ces lancées dirait fb, … en fait, je ne sais pas
oui bout à bout pour voir
oui des lancées, des amorces, des riens qui sont beaucoup, des images de boucher et de carcasses d’animaux qu’on charrie, du Bacon dans tout cela
un monde néanmoins assez étranger au mien, étrange…
je navigue à vue…
merci Nat
Merci Françoise (un jour d’image plus âpres sans doute)
Quelle force vous avez pour passer ainsi du « glanage » à la construction. Merci Nathalie Holt de donner formes, d’informer, ces mondes qui nous parlent. Merci.
glaner construire oh c’est gentil …MERCI Ugo