le premier jour de l’enfant
l’odeur de son sommeil à la commissure du cou et de l’épaule
le premier matin de la nuit des amants
L’AURORE de Murnau, l’aurore de Murnau
l’aube de Rimbaud
le cercueil qu’on redresse à la verticale pour passer entre les portes étroites et on ne sait pas bien où est la tête dans la boite qui penche
l’élégie de Fauré et leurs doigts fauchent les notes
le mère de Dumbo dans sa cellule
la fusée de Mélies dans l’œil de l’astre
un petit pas pour l’homme et un bond de géant pour l’humanité dans une image pleine de bruit
la pleine lune de la fenêtre avec son visage de nuage qui reste dans la tête de l’enfant qui regarde
les boites de vache qui rit et le chandail de laine bleue tricoté main
l’enfant du sixième sur le brancard dans le couloir cramé des chambres de services
David Copperfield à la lueur d’une lampe et ce papillon qui cogne l’abat jour quand David pleure
une main qui déplace une mèche, la sienne; le gant humide qu’elle porte au front du petit, la bassine qui se remplit
quand elle mime les doigts du rabbin pour la circoncision du petit Rothschild, où qu’elle raconte l’histoire de John Ferguson qui avait « shon vergessen »
les suppositoires à la nitroglycérine que tu demandes au pharmacien et tu rougis
Le salaire de la peur que tu n’as jamais vu
le jour ou De Gaulle meurt : bal tragique à Colombey, 1 mort
le vaporetto de Mahler qui se superpose à la toile bleue de Nicolas Staël
la rue en liesse de 1981 avec la pluie comme pour un mariage heureux
l’union désunie de la gauche et la veuve qui se taira.
la lampe orange sur la moquette prune d’une pièce qui te parait immense ; leur air grave pour dire qu’ils se séparent
la mariée engloutie de l’Atalante, celle de La nuit du chasseur
Façon tragique de tuer une femme de Nicole Loraux
Deleuze qui dit : « pour les bêtes c’est à dire à la place de »
le corps de Nastassia Philippovna qui pue ; la mort d’Emma : Sa poitrine aussitôt se mit à haleter rapidement. La langue tout entière lui sortit hors de la bouche; ses yeux, en roulant, pâlissaient comme deux globes de lampe qui s’éteignent, à la croire déjà morte, sans l’effrayante accélération de ses côtes, secouées par un souffle furieux, comme si l’âme eût fait des bonds pour se détacher.
le sourire intérieur du mécano de la générale ses mains dans un film de Beckett
la gare d’ Oświęcim et la contrôleuse à casquette du train vide
Les images qu’on croie disparues, tout ce qui revient pour disparaitre.
« Parlez moi du sous sol »
la souffleuse du trou qui était la mémoire d’un théâtre
(je ne sais rien de la consigne, mais) ce voyage dans tes rêves, tes chez toi, et tes ailleurs, enroulé sur un air languissant et secret qui pour toi seule… entrebaille pour nous un infini des suites,
Chère Catherine https://equinoxe.blog/ merci pour tes lectures qui donnent élan à l’écriture.
Te dire combien j’aime l’oiseau ( Gustave Trouvé ) mécanique de la revue Dire qui sautille sur la langue avec sa clé au dos et son cœur édenté http://www.tierslivre.net/revue/spip.php?article801
« tout ce qui revient pour disparaitre » Merci Nathalie Holt pour ces tisses faites aux mots qui -comme le souligne en effet Catherine Serre- emportent, ouvrent les portes à des suites, fugues et variations infinies. Merci aussi, au passage, pour Nicole Loraux, entre autres sentes évoquées.