La cuisine plutôt dépouillée, absence de meubles d’appareils ménagers, vide de ses occupants. Si, reste elle qui finit la vaisselle et lui toque à la porte, vient s’asseoir près de la table en formica verte. Le soleil emplit la pièce par la fenêtre sans rideaux. Tu parles tranquillement et tu la regardes, elle se retourne vers la cuisinière l’éponge à la main. Et silence, le silence dure. Tu la regardes en souriant, elle te proposeras un café. En mettant la poudre elle compte mentalement le nombre de cuillerées, elle voudrait comprendre un peu, dans la gène qui devient sensible, à défaut de savoir, tout en se creusant la tête, elle bouge prends le sucre et la cuillère, n’oublie pas le lait attrape un torchon essuie une goutte tombée là. Tu la cherches, attends patiemment qu’elle soit assise. Dans ta solitude tu cherches en face d’elle qui cherche, croisement de phrases muettes échangées dans l’air chargé. Comprendre, pressentir. Comme un train qu’on n’aurait pas pris et qui s’en va maintenant.
Remplir le caddy, tout poser sur le tapis, remettre dans la voiture, ramener à la maison, ranger dans les placards et faire le repas, aujourd’hui mais tous les jours, toute l’année déposer son tablier, ne plus rien faire, abandonner.. La cuisine est pleine maintenant, il est rentré du travail et ilselles de l’école, ça bouge et parle et raconte un tohu-bohu chaleureux de grande famille. Maintenant ils sont tous assis autour de la table. Mettre de l’ordre dans ses idées, ne pas tout dire à la fois, calme, calme. Et quel emportement a surgi tout à coup marmonner puis crier encore plus fort, d’aider d’en faire plus, de ranger ci et ça de participer et puis aussi de, se retourner attraper la poêle en colère et servir tout le monde. Raté, c’est raté, pas comme ça, c’est nul, le contraire de ce qu’il fallait. Reste à se taire comme eux se ferment. Leur silence est assourdissant, disparaître là sur le champ ou recommencer au début ou effacer tout.
On est en septembre un peu tard le soir il commence à faire sombre, marcher dans la forêt à cette heure là est magique. avec toi on avance dans le sentier, les motos et quads ont terminé leurs virées, aucun bruit. Mais si, imperceptiblement parviennent des bruissements frottements frémissements des feuilles tremblantes, des crapauds plus loin derrière, un vol d’oiseau agitant les branchages, le bois mort craquant sous les pieds. Tu vas devant assuré et tranquille, cette forêt tu la connais bien pour y avoir marché souvent pendant des heures, tu viens y échapper à tes colères, tes emportements d’homme un peu fou un peu déjanté, tu as besoin de te fatiguer. Tu viens d’allumer ta lampe torche, inspecte autour de toi, t’arrête, te retourne, tu me regardes pour t’assurer que je suis. Tu me regardes.
De plus en plus profond et touchant.
Je suis ce que vous nous dites au fil des textes même si je commente rarement.
Merci, Danièle, merci beaucoup. C’est dur en ce moment. Votre mot réconforte. A bientôt.
les phrases muettes, le silence assourdissant…et l’image du train qu’on aurait pas pris et qui s’en va… très touchant, Simone!
Merci, Mireille. Tu me fais très plaisir.
Ah oui c’est très touchant. Ces textes réveillent des situations proches. Merci
Merci, Véronique pour ce commentaire. Ça fait beaucoup de bien. Je vais aller vous lire. Bonne soirée.
une brume épaisse de non-dits, de retenue, de solitude, une habitude d’être aux aguets et la grande pudeur de n’en rien imposer, je lis un peu souffle coupé, ne rien bousculer.
Jacques, votre commentaire met des mots sur mon texte, des mots qui m’aident à dire. Je le garde, et le relis. Merci beaucoup.