A propos de Ugo Pandolfi

Journalist and writer based in the island of Corsica (France) 42°45' N 9°27' E. Voir son blog : scriptor.

#gestes&usages #02 | marche ou crève

Il ne marche pas, il ânonne ses pas, hésitant sur ses jambes comme sur des mots ou des syllabes trop fragiles désormais, incapables à présent de le supporter. Lente progression sans intonation expressive, privée de sens tant le moindre mouvement engloutit une durée sans fin, un insupportable et cruel temps long. Seuls les bras indiquent comme une direction. Tendus, vers Continuer la lecture#gestes&usages #02 | marche ou crève

#gestes&usages #01 | rien ne se panse

A cause de la douleur de sa disparition, de l’incompréhension brutale qu’elle entraîne, de l’absence injuste qu’elle installe, le monde n’est plus qu’un puzzle de fragments découpés mis sous verre, un mur d’images déchirées dont les collages ne livrent aucun sens et dont les couleurs n’existent plus. Mais il y a les odeurs qui demeurent. Il y a l’odeur résistante, Continuer la lecture#gestes&usages #01 | rien ne se panse

#enfances #09 | d’une chambre l’autre

Lit cosy aux livres rangés, marbre blanc de l’immense commode maculé de taches de colle et de peintures, un tiroir boîte à outils, la fenêtre étroite, sa persienne verte écaillée, odeur de solvant et d’huile de lin Immense lit où elle dormait, le revolver d’ordonnance dans son étui jambon dans le tiroir de la table de chevet, le juxtaposé Verney-Carron, Continuer la lecture#enfances #09 | d’une chambre l’autre

#enfances #08 | ondes, iode, murs

Les ondes Martenot Seul le mardi différait des autres soir par un son terrifiant. Dans le noir de l’unique pièce, les parents écoutaient la radio. Ce n’était pas un jeu. Jamais nous ne jouions. A 20 heures 30 pile, Tempo di Suspense envahissait tout l’espace et rien ne pouvait me protéger des angoissantes ondes Martenot de ce générique obsédant. L’huître Je Continuer la lecture#enfances #08 | ondes, iode, murs

#enfances #07 | pich rad

L’armée augmentait. Il pinçait chaque fois que la grand-mère haïtienne l’accueillait. Les cavaliers et leurs montures vivaient cachées dans une boîte à chaussures elle même cachée sous un meuble dans le couloir mal éclairé. Il pinçait tellement que la grand-mère s’inquiétait de ses ‌pich rad disparues. Elle cria même, un jour. C’était aprés la grande bataille, avec les cadavres, les animaux démembrés, Continuer la lecture#enfances #07 | pich rad

#enfances #06 | rester sans voix

Longtemps,bien des années après sa disparition, son numéro de téléphone demeurait et avec lui le message d’accueil qu’elle avait enregistré pour ceux et celles qui cherchaient à la joindre. Pour son mari, c’était une manière de la garder encore, même si depuis il s’était remarié avec l’une des meilleures amies de sa femme qui était sa maîtresse bien avant qu’il Continuer la lecture#enfances #06 | rester sans voix

#enfances #05 | émerveillance

Ne plus compter sur ses doigts pour aller au delà de dix La rencontre sensuelle avec le chat qui vient frotter son museau sur mes joues La chienne bergère qui me laisse tirer sa queue et accepte d’être mon cheval L’ours Popov qui me laisse gagner chacune de nos bagarres et s’endort toujours avec moi sans rancune  Une étroite et Continuer la lecture#enfances #05 | émerveillance

#enfances #04 | mâcher

Malade, c’était être mieux. Et mieux loti d’abord parce que déplacé, transporté, confié aux grands-parents qui abandonnaient leur chambre pour l’enfant fiévreux. Avoir un espace à soi, pour soi, pour n’y rien faire d’autre qu’être là, étonné et attentif aux lumières du matin, aux bruits de la rue, à l’odeur d’un lait chaud sucré de miel. Recevoir à la fin Continuer la lecture#enfances #04 | mâcher

#enfances #03 | mangement

Mangé. Dans la boîte inutile de bois gaspillé. Dans la boîte que la loi oblige, obligatoirement facturée. Conformité de la boîte, protocole respecté. Je ne sentirai pas les flammes mangeant, dévorant ce que je ne suis plus. Il est mangé de barbe, de poils, de mauvaises herbes, de chiendent, de lichens, de lierre, de mousse. Il est dévoré par le Continuer la lecture#enfances #03 | mangement

#enfances #02 | un jour descendre

Avantage d’une maison sans grenier: on n’y monte pas trouver les reliquats du passé. Dans la maison sans grenier, ils sont au sous-sol, au rez-du-jardin, remisés sans ordre, jetés sans remords , oubliés avec force dans les espaces gagnés sur le vide sanitaire, là comme les poussières que l’on ne veut pas voir, cachées sous un tapis. Les affronter est Continuer la lecture#enfances #02 | un jour descendre