#été2023 #02 | Jane Sautière

Copyright : R. Interlegator

 

Chowara, Shiva le magistral, statue de dix mètres ; de cahutes en villas, nous glissons en cahotant sur des pavés clairsemés enrobés de lambeaux de bitume, la nuit ne s’est pas encore réveillée, les odeurs trahissent la vie qui jamais ne se repose ici, nous y sommes toujours attendus. Les ruelles ne s’appellent pas, elles s’enhardissent au gré des habitations ou abris. Impossible de s’y retrouver, l’inconnu comme guide.

La lourdeur du portail s’apprécie à la lenteur de son ouverture. Qui l’avait refermé juste derrière nous ? Laissant la poussière au dehors, c’est ici le jardin extraordinaire, plusieurs frangipaniers aux troncs et branches à l’écorce lisse, dénudés, nous invite en leur parfum acidulé et suave des rares fleurs aux pétales épais, ils résisteront deux ou trois jours à une rouille inévitable. Une haie de fleurs rouge vif  nous sépare du terrain à l’abandon au voisinage incertain.

Les lattes de bois gris enjambent un étang, nos pas résonnent d’une nouvelle intention, cette allée nous mène en un lieu vide de présence, à droite un comptoir haut de bois sombre, un panneau avec le cours du change, quelques bureaux désuets aux tiroirs de bois déformés supportent un ordinateur ancienne génération.

Nous pourrions nous asseoir sur la lourde banquette trop profonde et inconfortable, tapissée de velours vieilli.  Un escalier en colimaçon laisse imaginer quelques chambres à l’étage. A gauche une allée bordée de fleurs, elles s’enlacent pour former de petits bosquets, de gros bouquets, les jasmins épais de leurs feuilles luisantes, constellés de fleurs escaladent les murs;en face, les chambres au mobilier insoulevable en bois noir et épais aux motifs végétaux, il résistera à l’humidité tropicale et grincera en glissant sur le carrelage sombre. Difficile de s’orienter dans cette immense pièce aux pans coupés et dont l’armoire ne respecte pas la topographie. Reprendre cette allée c’est arriver à la cuisine aux fenêtres minuscules crument éclairée de néons aveuglants. En face à droite une pelouse aux arbres gigantesques, des palmiers à la tête ébouriffée, des cocotiers toujours prêts à lâcher malicieusement quelques noix. Deux marches trop hautes aux arêtes émoussées, nous conduisent à la salle à manger couverte, ouverte, ornée d’orchidées aux racines aériennes. Ici le royaume des couleurs et des odeurs. Tout soudain la mer apparaît au travers d’un second patio octogonal de bois rouge et doré, en son milieu et à contre-jour une table et deux silhouettes face à face… 

#été2023 #01bis | le foulard vert

Ils ne voulaient pas qu’elle soit dépositaire de l’horreur, pas un livre pas une écriture à porter de regard, ses parents auraient eu peur d’y lire leur histoire celle d’une guerre, une guerre qui n’était pas la leur, une langue étrangère.  La paralysie asphyxie son cerveau d’enfant. Comment parler en toute invisibilité, comme eux, elle doit se cacher, ne pas commettre Continuer la lecture#été2023 #01bis | le foulard vert

#été2023 #01 | don des mots

La guérite, accessible en monte-charge, suspendue comme une baraque dans les arbres ; en suspension, c’est ça, elle est en suspension ou plus exactement suspendue aux lèvres de l’inspiration, surveillée par un imaginaire qui fait le guet pour témoigner d’un processus de création. C’est aussi la baraque aménagée pour abriter un(e) travailleur (euse) expression chère à Arlette, et son bureau de Continuer la lecture#été2023 #01 | don des mots

#été2023 #00 | prologue

Pour le protéger ses parents lui raconte une histoire, un conte de sa propre existence épuré de tous les dangers qui grondent. C’est l’enfant de ce livre qui s’étonne de ce qui se passe autour de lui, en lui et qui s’en étonne encore et m’entraine, c’est lui ou c’est moi suivant les instants. L’un comme l’autre, nous avons habité Continuer la lecture#été2023 #00 | prologue

#08 techniques / comme

Abandonné e s Comme le nez au milieu de la figure, les yeux derrière des culs-de-bouteille, comme le mégot tombé de sa bouche édentée dans le caniveau , comme l’éclat de l’obus fiché,  comme en solitude sur la table d’opération livrée à la barbarie chirurgicale et à la lampe scialytique du champ opératoire, comme le sein à la   science, comme à l’arrivée Continuer la lecture#08 techniques / comme

#techniques #07 | avec B. Noël train

Le train file droit et la terre est ronde,  Au commencement le tunnel, pour en voir le bout être dans le sens de la marche Le son du roulement entraîne les battements de mon cœur  Violence au sortir du sous-terrain comme jaillir d’un utérus, lumière féroce On s’extirpe on y est aspiré Nuit et brouillard, nous dépassons les trains fantômes Continuer la lecture#techniques #07 | avec B. Noël train

#techniques #06 | demain, le monde

Lèche-vitrine Ne pas s’attarder, ne pas céder  à toutes ces tentations, en toute inconscience elle ralentit son pas décidé, arrêt sur image, le rayon de soleil traverse les pierres, enlumine les métaux. Le reflet de son visage passe de l’autre côté du verre épais sans déclencher l’alarme, se fraie un chemin de présentoir en présentoir,  essayages impromptus, une consommation futile qui jamais Continuer la lecture#techniques #06 | demain, le monde

#techniques #05 | mâcher et remâcher variations Wajsbrot

L’été glissait en pente douce, il ne restait qu’une traînée de sa fulgurance, sa lumière attendrie pouvait nous fixer dans les yeux, cotonneuse, elle assourdissait tout, les moteurs des avions hurlaient en silence, la tendresse apaisée de l’automne pouvait advenir La chaleur de l’été alourdit le corps et l’âme, étirée sur l’herbe tiède, paresseusement langoureuse, un  soleil trop chaud rougit ma Continuer la lecture#techniques #05 | mâcher et remâcher variations Wajsbrot

#techniques #04 | portraits rapides

  Ce que c’est que l’onychophagie, toujours les doigts dans la bouche, il les suce comme une tétine qui ne satisfait pas sa faim : la faim de vivre, de croquer, de déchiqueter pour vérifier la texture, la saveur de ce bout de chair, de ce lambeau de peau, une aspérité qui le démange et dont sa colère aimerait venir  à bout. Continuer la lecture#techniques #04 | portraits rapides

#techniques #03 | derrière les silences, mon corps 

Copyright Interlegator France 2015 Derrière, devant les silences, mon corps exalte de son cri sans voix, la victoire de la vie, un corps éclaboussé de lumière par un monde sans passé, tant le cordon tissé de rouge et de noir a été coupé, avant de lui couper le souffle, derrière les silences, mon corps errant comme le juif, s’est faufilé Continuer la lecture#techniques #03 | derrière les silences, mon corps