A propos de Olivia Scélo

Enseignante. Bordeaux. À la recherche d'une gymnastique régulière d'écriture.

#été 2023 #12 | Le frère que je n’ai jamais eu

Enfoncé dans le canapé, j’essaye de ne pas écouter la voix geignarde, qui ressasse en boucle depuis des années, qui se plaint, qui s’excuse, qui m’accuse. Je sais que le piège est là, tout proche, que je peux facilement tomber dedans, que je suis souvent tombé dedans mais comment faire quand on est jeune encore, qu’on ne soupçonne pas les Continuer la lecture#été 2023 #12 | Le frère que je n’ai jamais eu

#été 2023 #11bis | l’univers de papier

J’interroge mon personnage sur ses lectures. Je profite du fait qu’il soit d’abord un être vivant, qu’il ne soit qu’accessoirement un être de papier. Peut-être que je trompe les muses en interrogeant directement le monde réel. Je l’interroge, je lui pose quelques questions auxquelles il répond de bonne volonté. Je veux d’abord savoir ce que lisait sa grand-mère ; et il Continuer la lecture#été 2023 #11bis | l’univers de papier

#été2023 #11 | Avant qu’ils ne partent…

Avant qu’ils ne partent… Avant que je ne parle du départ de Louise et de Jean-Marie pour Bordeaux entre 1891 et 1894, il faut que je parle des usages sociaux dans la société pyrénéenne du XIXe siècle. Je m’appuie sur l’étude ethnologique d’Isaure Gratacos pour tenter de comprendre les motifs de ce départ. Ils ont une vingtaine d’années et ils Continuer la lecture#été2023 #11 | Avant qu’ils ne partent…

#été 2023 #10bis | le choeur des femmes pyrénéennes

Le chœur des femmes pyrénéennes Qui est-tu étrangère ? Quel est ce statut de scribe de la mémoire que tu revendiques ? Nos coutumes ne sont pas écrites et nous n’avons jamais eu besoin de quelqu’un pour le faire. Notre tradition est transmise oralement depuis plusieurs siècles. Nous ne voulons pas de scribe. Notre langue est l’occitan. Ta langue pointue n’est pas Continuer la lecture#été 2023 #10bis | le choeur des femmes pyrénéennes

#été2023 #10 | Louise

Louise n’est pas un personnage de roman. Elle se moque bien de ce que je peux écrire sur elle, impénétrable au temps maintenant. Elle occupe l’espace qui compresse le temps dans des instants figés. Mais cette présence discrète détient encore l’autorité sur le reste. Elle est ce halo sombre qui l’entoure sur la photographie, elle est ce halo plus clair Continuer la lecture#été2023 #10 | Louise

# été 2023 #9 | la trappe

La trappe Il faut imaginer une maison de montagne, un sol constitué de vieilles planches larges et noueuses. Il faut imaginer une demeure ancienne fermée la plupart de l’année comme sortie d’un conte de fée. Les odeurs rances et humides des lieux délaissés ont été remplacées par des effluves qui transpirent des murs comme une matière organique : l’odeur fleurie du Continuer la lecture# été 2023 #9 | la trappe

#été 2023 #8bis Un sillon d’encre bleue

La taille de l’obus est vraiment impressionnante, on imagine mal l’engin qui peut propulser quelque chose comme ça. Joseph pose sa main droite sur la forme allongée en cône de l’arme de guerre. Le pouce est replié sur la pointe comme s’il était en train de gratter la couverture métallique, les quatre doigts sont appuyés sur le revêtement lisse du Continuer la lecture#été 2023 #8bis Un sillon d’encre bleue

#été2023 #08 | carte postale

C’est une vieille carte postale, au recto une photographie pas tout à fait cadrée sur le fond blanc, au verso les indications usuelles, la mention carte postale et la séparation verticale, prévue pour le texte d’un côté, l’adresse de l’autre. On est en 1917. On se fait tirer le portrait, chose rare. Henri reçoit la carte postale de de son Continuer la lecture#été2023 #08 | carte postale

#été2023 #07bis | l’odeur de la forêt

Je n’ai pas assez parlé de cette odeur, l’odeur de la forêt. Quand les grands bois s’assombrissent, l’humidité envoie ses relents acides, les gouttes s’échappent discrètement des moisissures des arbres. Les troncs écorcés, les pierres déshabillées de leur mousse, la terre retournée charrient les cadavres anciens. Le bâton du vieux qui tape fébrilement sur le sol réveille les morts. Je Continuer la lecture#été2023 #07bis | l’odeur de la forêt

#été2023 #07 | Le vieux qui se souvient

Le vieux frappe sur la pierre avec son bâton de marche, il est six heures, la forêt s’assombrit dans l’humidité qui monte, quelques gouttes s’échappent discrètement entre les arbres. Il écorce les troncs, il déshabille la pierre de sa mousse, il retourne la terre. Je l’interroge sur le passé de la vallée, c’est une chance de l’avoir rencontré là, sur Continuer la lecture#été2023 #07 | Le vieux qui se souvient