A propos de Olivia Scélo

Enseignante. Bordeaux. À la recherche d'une gymnastique régulière d'écriture.

#gestes&usages #02 | La première marche

Selon la légende familiale, je marche à neuf mois. L’enfant que je vois sur les photos, le jour de ses premiers pas, s’est levé sans appui et marche sur le sable humide et finit par courir sur la bande granuleuse d’une plage d’Arès. Se lever sans appui et ordonner une nouvelle marche du monde à partir d’un point d’équilibre en Continuer la lecture#gestes&usages #02 | La première marche

#gestes&usages #01 | La geste des colporteurs

À cause de la couleur blanche de la neige, je vois les villages des Pyrénées comme une Arcadie d’hiver à travers laquelle un ange pourrait nous conduire par la main. J’oublie que les températures sont très basses, que les végétaux sont en sommeil, que les cultures sont en friches, que les animaux hibernent, mais que les êtres humains doivent poursuivre Continuer la lecture#gestes&usages #01 | La geste des colporteurs

#enfances #08 | corde à sauter etc.

C’est une corde à sauter en caoutchouc épais comme un long tube fluorescent. La mienne est jaune celle de ma sœur rose. On joue en bas de l’immeuble, c’est-à-dire qu’on saute le plus vite possible en avant, en arrière, en croisant les bras, en les décroisant, à cloche pied et le tout combiné jusqu’à se prendre la corde, ou plutôt Continuer la lecture#enfances #08 | corde à sauter etc.

#enfances #05 | Notes d’enfance

les bouchons multicolores pour la pêche à la truite, la ligne rouge au milieu du vert sombre l’inflorescence ailée du tilleul, le tourbillon dans l’air de l’hélicoptère, la feuille ouverte en deux collée sur le nez comme une trompe le marron verni et lisse sorti d’une bogue hérissée, le fruit gratté contre la pierre afin d’extraire sa pâte molle les Continuer la lecture#enfances #05 | Notes d’enfance

#enfances #07 | Babar

Couronné de jaune, habillé de vert vif, chemise à col boutonnée de noir, Babar est l’éléphant roi de son enfance. Plus efficace à mâchonner que des oreilles de lapin, qu’un lange brodé accroché au bout d’une chaîne en plastique, sa trompe grise s’est progressivement déchirée. Pas un Babar donc, mais des Babar, la même peluche rachetée, fiévreusement recherchée quand elle Continuer la lecture#enfances #07 | Babar

#enfances #04 | Le corps étranger

Ne pas rester au lit quand on est malade, c’est plutôt ça l’expérience de l’enfance. Ne pas rester au chaud, ne pas avoir de pantoufles, ne pas porter de robe de chambre. Marcher pieds nus sur le carrelage. Ne pas s’enrhumer par les pieds, ne pas attraper froid, ne pas laisser la chaleur s’échapper par la tête. Ça n’existe pas. Continuer la lecture#enfances #04 | Le corps étranger

#enfances #03 | la retenue d’eau

Il part avec sa canne à pêche. Ils partent, ils sont trois. Lui, et les deux frères. Ils partent seuls dans la montagne comme des enfants perdus. On dirait que. On dirait qu’ils sont trois enfants de onze ans et que la montagne leur appartient. On dirait qu’ils n’ont même plus besoin maintenant d’avoir une famille, un toit, des soins Continuer la lecture#enfances #03 | la retenue d’eau

#enfances #02 | comme des jouets

À condition de tout remettre en ordre, L. avait la permission de sortir de leurs petits tiroirs les objets du grand-père rangés avec un soin maniaque. Le meuble de rangement, à défaut d’avoir trouvé une place plus propice, occupait un coin de la salle de bain à côté du placard dans lequel se trouvaient des cannes à pêche en bambou Continuer la lecture#enfances #02 | comme des jouets

#enfances #00 | la source

J’imagine L. dans ce décor de lanterne magique de l’enfance, je l’imagine dans un décor enchanté tournant en boucle, disant : montagne, rivière, prairie. Et encore. C’est comme courir après un bus qu’on n’attrapera jamais. C’est comme dans les rêves. Mais pas de bus, pas de rêves, juste la réalité fuyante pour sa plus grande joie. Cette expérience-là. Devant lui, le Continuer la lecture#enfances #00 | la source

#été 2023 #12bis | le portique de fantaisie

Je n’ai pas l’occasion de me rendre chaque jour au musée Jacquemart-André à Paris pour contempler le Portique de fantaisie de Francisco Guardi. Un riche aristocrate comme Edouard André, collectionneur d’art, s’est certainement assis quotidiennement dans son fauteuil récamier couvert de soie dans le salon des tapisseries. J’ai acheté pour quelques euros une petite reproduction en format A4 que j’ai Continuer la lecture#été 2023 #12bis | le portique de fantaisie