A propos de Muriel Boussarie

Je travaille sur un chantier d’écriture au long cours et j’espère avoir assez de souffle pour le mener à terme. L’intuition de ce projet a surgi ici, dans un atelier du Tiers Livre. Il était question de se perdre dans la ville. Comme je ne voulais pas suivre une piste trop autobiographique, j’ai délocalisé l’errance en la situant dans la ville de K., un avatar de Hong Kong qui m’avait tant fascinée. Alors un personnage, un homme, Tu, toujours interpellé, est immédiatement apparu dans une rue de K. où il s’était égaré. Malgré cette entrée en matière – très forte pour moi – je n’ai pas pensé au départ écrire une histoire, encore moins un livre. Mais je voulais écrire, rêver un univers, celui de K. Quelques textes ont ainsi vu le jour sur mon blog. Puis lors d’un nouvel atelier de François Bon, un fil d’histoire plus précis s’est ébauché : le départ de Tu et L. vers les îles pour fuir la dictature qui sévit à K. À ce moment-là s’est déclenché un grand désir de narration. Beaucoup de choses se sont précisées au fil de l’écriture, bien des personnages sont apparus… Et régulièrement j’utilise des consignes de l’atelier comme pistes pour développer mon récit.

#photofictions #09 | sortant du bois

Sortant du bois, de la moiteur organique des taillis, inextricables enchevêtrements de ronces, d’épineux, d’aubépines, en s’avançant sur des mousses spongieuses bordées de corolles blanches dans l’odeur entêtante de l’ail des ours. Sortant du bois sans rien avoir trouvé de concluant. Juste une chaussure en caoutchouc noir de taille 44, n’ayant probablement aucun rapport avec l’affaire. Le soulagement qu’il éprouve maintenant Continuer la lecture#photofictions #09 | sortant du bois

#photofictions #06 | en suspension

Phosphènes en suspension dans un silence de nuit flottant sur
des formes sombres indistinctes comme une pluie de cendres devant l’œil cherchant à délimiter les plis d’un drap bordant l’arrondi d’une épaule et la blancheur obscurcie d’une joue pleine d’enfant englouti dans le sommeil emplissant toute la surface carrée de l’image Continuer la lecture#photofictions #06 | en suspension

#photofictions #05 | les rushes Bái-Hǔ, official cut

Les rushes Bái-Hǔ, c’est-à-dire tout ce que j’ai coupé en pensant que ça ne passerait pas auprès des autorités de K. De l’autocensure, en quelque sorte. J’avais conçu mon film comme une ballade au sens musical du terme, où je voulais faire émerger quelques interrogations, une autre façon de regarder le Bas-Relief. Mais j’ai vite compris que je n’aurais pas le dernier mot, le final cut. Continuer la lecture#photofictions #05 | les rushes Bái-Hǔ, official cut

#photofictions #04 | ceci est mon corps

Un corps de femme aux bras repliés derrière la tête, à la peau claire en grande partie recouverte de dessins floraux avec aussi deux fines mains de squelette, l’une sur le sein droit de ce corps au bassin rond, aux jambes plantureuses que l’ossature d’un long bras traverse en diagonale pour aller déposer la seconde main de mort sur l’arrondi du ventre Continuer la lecture#photofictions #04 | ceci est mon corps

#photofictions #03 | trou noir

Une nuit profonde où se devine à peine l’arrondi lustré des têtes et des pieds de lits en rotin recourbé, les plis sombres des habits déposés sur une chaise, le drapé d’un rideau à demi tiré, les silhouettes des enfants blottis dans les draps, un corps de poupée plié à angle droit sur le froid du dallage, et un galop noir sur l’horizon des rêves Continuer la lecture#photofictions #03 | trou noir

#photofictions #01 | comme des notes

Penchée vers son livre ouvert sur ses cuisses, elle lit. Seule sur un rocher du ruisseau artificiel qui coupe le bas de la pelouse en pente. Son sac en tissu est posé à côté d’elle. Elle est vêtue d’une robe sombre à motifs floraux et de sandales noires. Hors champ, trois ou quatre jeunes enfants s’ébattent près de l’eau, quelques Continuer la lecture#photofictions #01 | comme des notes

#40jours #30 | et si tu glisses dans l’eau

Apprends à lire ton corps quand il se faufile entre les verticales de la ville, quand il hante les rues à l’est de Long Mercy Camp un pas devant l’autre machinalement, ou s’il hésite sur des pavés inégaux, apprends à lire les vibrations qui le traversent quand il arpente Salisbury Road, quand il longe les quais et suit des lignes Continuer la lecture#40jours #30 | et si tu glisses dans l’eau

#40jours #double | l’autre chemin

La forêt n’est pas si loin de la ville natale. Nous avons marché sur un chemin entre deux champs, en direction de la forêt. Les longues promenades en famille étaient rares mais mon grand-père maternel aimait les champignons et avait assez d’allant pour entraîner tout le monde. À l’orée de la forêt, deux chemins s’offraient à nous pour y pénétrer. Continuer la lecture#40jours #double | l’autre chemin

#40jours #31 | le Grand Homme et le tigre blanc

Noir sur Blanc. Ciel d’orage, lumière crue, ombres denses. Ouvriers en salopettes de cérémonie. Brosses en main. Chassent les poussières d’acier du bas-relief. Lustrent nez, bouches et cheveux de métal. Sur une échelle, l’un d’eux se hisse vers la figure du Grand Homme. La frotte d’un chiffon. Un autre muni d’un long balai éponge nettoie le filigrane du Tigre Blanc. Bande-son Continuer la lecture#40jours #31 | le Grand Homme et le tigre blanc