A propos de Muriel Boussarie

Je travaille sur un chantier d’écriture au long cours et j’espère avoir assez de souffle pour le mener à terme. L’intuition de ce projet a surgi ici, dans un atelier du Tiers Livre. Il était question de se perdre dans la ville. Comme je ne voulais pas suivre une piste trop autobiographique, j’ai délocalisé l’errance en la situant dans la ville de K., un avatar de Hong Kong qui m’avait tant fascinée. Alors un personnage, un homme, Tu, toujours interpellé, est immédiatement apparu dans une rue de K. où il s’était égaré. Malgré cette entrée en matière – très forte pour moi – je n’ai pas pensé au départ écrire une histoire, encore moins un livre. Mais je voulais écrire, rêver un univers, celui de K. Quelques textes ont ainsi vu le jour sur mon blog. Puis lors d’un nouvel atelier de François Bon, un fil d’histoire plus précis s’est ébauché : le départ de Tu et L. vers les îles pour fuir la dictature qui sévit à K. À ce moment-là s’est déclenché un grand désir de narration. Beaucoup de choses se sont précisées au fil de l’écriture, bien des personnages sont apparus… Et régulièrement j’utilise des consignes de l’atelier comme pistes pour développer mon récit.

#anthologie #prologue | je neige

Je nais en mai      alien en mon crâne allongé    chauve       j’ouvre des yeux noirs    ahuris    je surprends     peut-être que j’émerveille    une surprise dont l’écho traverse les ans     à chaque anniversaire ma mère se demande de quelle planète je venais     derrière la fenêtre elle regarde des flocons tomber    je ne les vois pas       mais j’entends le silence      ce jour-là Continuer la lecture#anthologie #prologue | je neige

#été2023 #10bis | Tu ne voudrais pas

Tu ne voudrais pas qu’on dise que tu as trahi le Réseau. Qu’on le dise ou qu’on le laisse entendre. Encore moins qu’on l’écrive dans un livre. On commence déjà à l’insinuer sur les Nœuds Secondaires que le Réseau vient d’annexer et qui colportent maintenant les narratifs de sa propagande. On sous-entend que tu as trahi, on le suggère sans Continuer la lecture#été2023 #10bis | Tu ne voudrais pas

#été2023 #10 | Tu attends L.

Tu asperges ton visage. L’eau fraîche, tu la laisses couler sur ton cou. Tu viens de te raser. Un reste de jeunesse apparaît sur tes joues. Et surtout la clarté de tes yeux. Une joie. Des mots que tu ne prononces pas. Tu entends ton sang battre. Tu enfiles une chemise, bleue nuit, presque repassée. Tu en retrousses les manches. Continuer la lecture#été2023 #10 | Tu attends L.

#été2023 #09 #09bis | la spirale

    au centre du jardin  la spirale      un cri étouffé     la spirale de graviers autour d’un trou sombre      elle se précipite     son enfant s’avance, château branlant, sur les pierres plates       le soleil est passé derrière l’immeuble voisin      il avance vers le centre du jardin       ondulations des graviers      elle se précipite derrière lui      sur l’allée de pierres plates      Continuer la lecture#été2023 #09 #09bis | la spirale

##été2023 #08bis | le noir tremble

L’encre luit au creux de la pierre. D’un noir brillant qu’un rayon oblique vient aveugler. Le pinceau s’y abreuve. La porte d’entrée entrouverte, il suffit de la pousser un peu. Il reste quelques secondes immobile dans la pénombre sous le souffle du grand ventilateur. Une goutte s’échappe du pinceau gorgé d’encre. Continuer la lecture##été2023 #08bis | le noir tremble

#été2023 #08 | Iris 8-1

Gueules d’iris barbus, noirs, bleus nuit, bruns aux mâchoires jaunes. Les fleurs se détachent comme mises en avant, extraites du fond vert, flou, du petit tableau (25 x 25 cm). Elles sont peintes avec un mélange de réalisme et de stylisation qui est la façon de Mirna. Cette nouvelle série comporte la particularité de suggérer une sorte de monstruosité voire de dangerosité des fleurs (cependant fort belles) Continuer la lecture#été2023 #08 | Iris 8-1

#été2023 #07bis | l’odeur-fantôme

Elle colle son nez à l’épaule pour renifler son aisselle. S’est isolée dans les toilettes, a retiré sa veste, dégrafé sa chemise. Elle renifle l’autre aisselle, aspire sa moiteur aigre de bergamote. Elle renifle aussi le creux des coudes, l’intérieur des poignets, sur les veines la senteur estompée d’une goutte de parfum. Ce n’est pas ça, l’odeur qu’elle cherche, l’odeur un peu brûlée qui affleure Continuer la lecture#été2023 #07bis | l’odeur-fantôme

#été2023 #07 | nu de L.

    frottant, savonnant membres, saillances, creux, renflements, fentes, cavités      savonnant de nouveau la peau lisse satinée     la frottant rudement      impossible effacement      la sensation du shampoing liquide sa fraîcheur sur le cuir chevelu malaxé par les doigts      Continuer la lecture#été2023 #07 | nu de L.

#été2023 #06bis | la beauté du chiffre

mon corps compte sans arrêt      514    515    516    517    518    519    520    521      seconde après seconde      527   528   529 530    531      il compte le temps qui coule     610    611   612    613      il est le Temps qui bat      1001   1002    1003    1004    1005      allongée dans la pénombre je sens mon cœur      égrener les secondes Continuer la lecture#été2023 #06bis | la beauté du chiffre