A propos de Isabelle Charreau

j’arpente plus facilement les chemins de terre que les pavés de la ville, je fréquente l’atelier pour le plaisir comme des gammes, sans projet de partition

#enfances #05 | phylactères

Passer en courant sur les jets des tuyaux d’arrosage perforés, la crainte, la fraicheur, le plaisir d’avoir osé. Aspirer à pleine bouche le jus de l’orange dans la chair libérée sous le chapeau d’écorce découpée, logé dans la pulpe le sucre fond, ignorer les coulées autour des lèvres rougies. Remonter le mécanisme sous la bouteille avec la petite clé et Continuer la lecture#enfances #05 | phylactères

#enfances #04 | La truffe de l’ours

La truffe de l’ours, le goût de sa truffe, l’ours n’a qu’un œil évidemment, je veux dire comme tous les ours il n’a qu’un œil, comme tous les ours en peluche, il lui manque un œil, il lui manquera un bras, son ventre se déchirera et je verrai ce qui le remplit, la mousse, les morceaux de mousse jaune qui Continuer la lecture#enfances #04 | La truffe de l’ours

#enfances #03 | L’autre côté

Traverser d’un pas. Je vois l’autre côté. L’impact fissurant mon monde. Je ne les vois plus. La faille grandissant. La perte définitive. J’apprends. Explorer. Se perdre dans les souterrains les sous-sols les bas-fonds derrière les mots. Ils ont disparu. Elle n’ose pas regarder autour, peur d’imaginer dans l’ombre des arbres, ils y sont cachés. Sortez ! elle dit. Se perdre. Consolider. Continuer la lecture#enfances #03 | L’autre côté

# enfances #02 | propos décousus

J’ai une boîte à boutons, j’ai toujours eu une boîte à boutons, je n’imagine pas une maison sans une boîte à boutons et serais bien étonnée que chaque foyer n’aie pas la sienne, indispensable. Les jours de pluie sont associés à la boîte à boutons, les jours d’ennui aussi. L’objet lui-même je ne le revoie plus précisément, diverses images se Continuer la lecture# enfances #02 | propos décousus

#enfances #01 | trois de si loin

Toto le samedi midi vient chez nous pour l’apéro et pour le tiercé — une odeur d’anis. Toto, enfin Marcel dit Toto parce que sa femme aussi s’appelle Marcelle. Marcel et Marcelle. Il est routier, son rire explose à la fin des blagues avec sa grosse voix et son accent parisien. Marcelle a un bouton rose sur le menton, un Continuer la lecture#enfances #01 | trois de si loin

#enfances #00 | Ne pas se retourner

Une forêt, un chemin, une enfant, trois ans ou cinq peut-être, marche entre ses parents. Le jeu que l’enfant aime que l’enfant réclame que l’enfant redemande inlassablement, le jeu du saut. Elle sent chacune de ses mains fermement serrée dans une main plus grande. Entourée rassurée soutenue. Il faut compter, elle sait compter au moins à trois, il faut compter Continuer la lecture#enfances #00 | Ne pas se retourner

#été2023 #09 | il y a toujours un jardin

Il y a toujours un jardin. Dans le premier il a grandi, le jardin derrière la maison des corons de Wingles, tout en longueur étroit et serré comme protégé de chaque côté par des frères semblables, jardins qui se répondent, on s’échange les plants les graines les recettes, on compare, on se prête des outils, on partage les récoltes la Continuer la lecture#été2023 #09 | il y a toujours un jardin

#été2023 #08bis | Le marque-page

La boite de crayons de couleurs boîte métallique de crayons « à peindre » — je colorie puis après je peux passer un pinceau avec un peu d’eau — comme elle faisait avec l’aquarelle — les coloriages ça me passe le temps — la boîte contient au moins quarante crayons rangés par couleurs des dégradés par nuances le corps enduit d’un vernis Continuer la lecture#été2023 #08bis | Le marque-page

#été 2023 #08 | fosse n° 8

Il y a un arrêt de bus devant les Grands Bureaux à cette heure il n’y a plus de bus. Il attend là, son bras blessé en écharpe, les saignements ont l’air de cesser sa manche est complètement imbibée, rouge de différentes nuances entre le bordeaux foncé du sang séché et l’incarnat des dernières coulées. Il doit trouver un taxi, Continuer la lecture#été 2023 #08 | fosse n° 8

# été 2023 #07bis il n’a pas assez parlé

Il n’a pas assez parlé de cette odeur de sang mêlé odeur de métal d’entrailles débordantes odeur de souffrance odeur de savon liquide odeur de désinfectant qui jamais ne peut masquer toujours dessous l’odeur de miasmes toujours revient l’odeur de pus il n’a pas assez respiré l’odeur du vent son esprit ne peut recomposer l’odeur du vert de l’herbe l’odeur Continuer la lecture# été 2023 #07bis il n’a pas assez parlé