A propos de Geneviève Flaven

Je suis née à Paris en 1969. En 2001 à Nice, j’ai fondé une agence de conseil en design puis suis partie à Shanghai pour développer mes activités. Le départ en Chine m’a mené vers l’écriture et la publication. Depuis mon retour en France en 2019, je me consacre à la création et à l’animation de projets collaboratifs de théâtre documentaire en France et dans le monde. Théâtre : The 99 project (http://www.the99project.net/ ) Blog de mes années chinoises : Shanghai confidential (https://shanghaiconfidential.wordpress.com/)

#L8, œils-de-bœuf

Le cheval s’engage au pas dans l’allée bordée de roses trémières. Au fond du chemin herbeux se dresse la maison des Leroy, une bâtisse blanche avec un toit d’ardoises, brisé, typique des fermes picardes. Un cahot de la charrette tire Yvonne de sa torpeur. L’œil encore embué de sommeil, elle regarde la façade de cette maison qu’elle a quittée il Continuer la lecture#L8, œils-de-bœuf

#L7, cargaison

Une jeune accouchée Yvonne arrive en charrette. C’est ma tante qui m’a raconté ce souvenir; elle a gardé un image précise de ce 28 juillet 1943, jour de la naissance de ma mère (personnage central du livre). L’image s’est tout de suite imposée à moi : la charrette, le cheval, la campagne écrasée de soleil, vibrante de chaleur et bourdonnante d’insectes. Continuer la lecture#L7, cargaison

#L6, seule la folie

J’ai vécu la guerre sans père et la vie sans mère. Je n’étais pas véritablement orpheline mais quand j’étais toute petite, je ne savais pas que mon père était parti à la guerre, réquisitionné au service de la guerre. Non! je croyais qu’il était parti tout court. D’où me venait cette sensation ? Ma mère se sentait très seule. Elle était Continuer la lecture#L6, seule la folie

#L5, à l’assaut des talus

De chaque côté de la route, s’étendaient champs cultivés de colza et de betteraves à sucre bordées mais des plantes adventices partaient à l’assaut des talus comme des petits soldats vigoureux : coquelicot, circe, chiendent, ortie, liseron, pissenlit, moutarde, trèfle blanc et fleur de lin. Vingt cinq ans après, les séquelles de la Grande Guerre étaient encore visibles car des centaines Continuer la lecture#L5, à l’assaut des talus

#L4, lignées

La correspondance de Flaubert Gustave: La haine des bons sentiments mais la bonhommie quand même. La tache de Roth Philip : s’en tenir au corps, à ses humeurs, à son effervescence. L’amour des uppercuts. Le système périodique de Levi Primo : le détail qui brise le cœur. Les poèmes de Dickison Emily : la majuscule et le tiret. Les chroniques japonaises de Bouvier Continuer la lecture#L4, lignées

#L3 chaud froid

Francine : Je n’aime pas ramasser les groseilles. D’abord, elles s’écrasent entre les doigts. Et puis, dans les groseilliers, il y a des bêtes. Ça fait du bruit. Des bruits d’avion, des petits craquements. Voilà maman qui arrive ! Elle ramène une petite sœur. Je veux la voir.  Grand-mère Taja a dit qu’il faudra faire attention car les bébés sont très fragiles. Continuer la lecture#L3 chaud froid

#L2 Les yeux cousus

Suite de #1 Babeuf Elle regarde l’enfant qui dort, les yeux cousus, son petit bonnet blanc sur son crâne chaud et mou, son corps candide et fragile qui repose sur le tissu tendu de la chemise blanche. Elle revoit sa blancheur perdue: le voile virginal des communiantes, ses doigts blêmes serrant le missel, ses ongles opalins, ses yeux de lait, Continuer la lecture#L2 Les yeux cousus

# P2 Blanc

Elle regarde l’enfant qui vagit, l’enfant née d’une coulée de lumière blanche, son petit bonnet blanc sur le crâne chaud et mou, son corps candide et fragile qui repose sur le tissu tendu de la chemise blanche. Elle revoit sa blancheur, le voile virginal des communiantes, ses doigts blêmes serrant le missel, ses ongles opalins, ses yeux de lait, l’ivoire Continuer la lecture# P2 Blanc

#L1 Baboeuf

Une charrette tirée par un cheval progresse calmement sur le chemin. Elle est assise sur le banc à côté du conducteur. Un cahot languide fait rouler sa tête. Une mèche de cheveu châtain s’échappe et glisse sur son visage jeune et las. Autour d’elle virevoltent des libellules, vifs bâtonnets bleus. Au bord de la route, une femme en tablier et deux Continuer la lecture#L1 Baboeuf

# P1, Je n’ai jamais aimé mes chambres

Je faisais grandes siestes sur une couverture de cheval à l’ombre d’un pommier et sentais contre ma joue, la feutrine rêche couleur de nuit. Je dormais d’un sommeil de brute, le front appuyé à la vitre sale dans le RER A entre Paris et Cergy et me réveillai brutalement quelques secondes avant Cergy Préfecture. Les nuits de fièvre, je fixais Continuer la lecture# P1, Je n’ai jamais aimé mes chambres