A propos de Geneviève Flaven

Je suis née à Paris en 1969. En 2001 à Nice, j’ai fondé une agence de conseil en design puis suis partie à Shanghai pour développer mes activités. Le départ en Chine m’a mené vers l’écriture et la publication. Depuis mon retour en France en 2019, je me consacre à la création et à l’animation de projets collaboratifs de théâtre documentaire. Théâtre : The 99 project (http://www.the99project.net/ ) Blog : Shanghai confidential (https://shanghaiconfidential.wordpress.com/)

#40jours #14 | périmée

Dans l’entrée, posée sur un coin d’étagère, un vide-poche. C’est plat creusé dans un bois sombre que Danielle a acheté dans un magasin de déco « ethnique ». Son vide-poche, plateforme de transit des objets sans domicile fixe est devenu le cimetière de sa péremption. Il contient une carte d’identité périmée (elle a vingt-six ans sur la photo et un Continuer la lecture#40jours #14 | périmée

#40jours #13 | sanguine

Il est Bordeaux, le vin, remède à son angoisse, vingt fois par jour, la mort à boire ; elle est carmin, la muleta des corridas de son enfance : elle est carotte, aimable et les cuisses roses ; elle est cerise, la corneille blessée nourrie de cerises et de comté, un souvenir de vacances où l’harmonie régnait ; il est  cramoisi, le rideau sur Continuer la lecture#40jours #13 | sanguine

#40jours #12 | trottoir

Le trottoir est bosselé car les muriers ont grandi vite et que leurs troncs musclés ont soulevé les grilles d’entourage et éclaté la peau épaisse du trottoir. Le trottoir est sale car les muriers jettent une ombre visqueuse sur le bitume et les maitres ne ramassent pas les déjections de leurs satanés clébards même quand on leur gueule dessus très Continuer la lecture#40jours #12 | trottoir

#40jours #10 | olvido

Danielle ne se souvenait pas très bien de la belle villa d’Acassuso à Buenos Aires. Elle était si petite alors. Lui revient seulement une terrasse fleurie chargée d’hibiscus où voletaient des colibris. Elle se souvient du mot picaflores. Elle ne se souvient pas très bien de la rue Olazabal dans le quartier de Belgrano, où la famille déménagea quand les affaires Continuer la lecture#40jours #10 | olvido

#40jours #09 | visages pressés

Elle, la petite quarantaine, brune peau lisse et bronzée, un tapis de yoga en bandoulière, une combinaison de coton brodée d’un vert vif, des sandales en nubuck au pied. Le magasin bio est très calme à cette heure. Elle a acheté trois bricoles, se dirige vers la caisse, se ravise, laisse son panier pour aller chercher une salade de lentilles Continuer la lecture#40jours #09 | visages pressés

#40jours #08 | Bintou Belle

Château d’eau : des rabatteurs attendent à la sortie du métro Château d’eau. Ils haranguent les passants pour les attirer dans les nombreux salons de coiffure africains de la rue du Château d’eau. On dirait des turfistes hurlant à l’arrivée du tiercé à Vincennes, des paparazzis crépitant sur les marches du palais du festival sur la croisette, des parieurs vociférant Continuer la lecture#40jours #08 | Bintou Belle

#40jours #07 | cargo

Quand Danielle eut deux ans en 1945, son père William mis en tête de se lancer dans les affaires à Buenos Aires. En octobre, par une journée d’un gris lumineux, il embarqua toute sa famille à bord du cargo Mar del Plata depuis le port d’Anvers, destination l’Argentine. La mère de Danielle, Edith, tenait avait un bébé de quelques mois Continuer la lecture#40jours #07 | cargo

#40jours #06 | le monde de Danielle

Danielle se disait apatride. Elle affirmait crânement qu’elle avait déménagé plus de vingt fois avant l’âge de seize ans et personne n’avait jamais songé à lui demander où? Le nomadisme impressionnait encore à l’époque (les compagnies  low-cost n’apparaîtront que dans les années 1990) aussi la carte du monde selon Danielle resta muette. On aurait pu y noter pourtant la route Continuer la lecture#40jours #06 | le monde de Danielle

#40jours #05 | carte mentale

Danielle tomba malade peu après. Une saloperie de kératite. Elle avait la sale gueule d’un boxeur sonné avec deux yeux rouges tuméfiés qu’elle masquait derrière d’immenses lunettes noires, les plus opaques qu’elle eut trouvées. Elle se terra chez elle pendant six mois. La chambre lumineuse de la rue du Dôme s’enfonça dans une nuit sans fin. Elle ne fit pas Continuer la lecture#40jours #05 | carte mentale

#40jours #04 | ne pas y penser

Danielle avait beaucoup trop dormi, ses pieds nus s’enfonçaient dans le tapis berbère et touchaient parfois, désagréablement,  des brins de laine durcis par le feu. Un jour, à fumer dans ta chambre, tu finiras par foutre le feu à la baraque, ma vieille. Ne plus y penser. Dans le salon, des bottines noires sont posées sagement au pied du canapé Continuer la lecture#40jours #04 | ne pas y penser