A propos de Françoise Renaud

Parcours entre géologie et littérature, entre Bretagne et Languedoc. Certains mots lui font dresser les oreilles : peau, rébellion, atlantique (parce qu’il faut bien choisir). Romans récits nouvelles poésie publiés depuis 1997. Vit en sud Cévennes. Et voilà. Son site, ses publications, photographies, journal : francoiserenaud.com.

trois lieux anciens

Ferme : on accédait à l’habitation par un petit jardin bordé de haies, le seuil était un bloc de pierre usé comme raboté, l’odeur tout de suite à le franchir (l’odeur des animaux des écuries du tas de purin pas loin forcément) concentrée dans le passage entre le dehors et le dedans et accompagnant le mouvement du pied en train Continuer la lecturetrois lieux anciens

ça ne s’arrêterait jamais si on voulait

Suis arrivée sur terre selon les prévisions, maternité dans une rue derrière le port. Ai ouvert les yeux, crié, gigoté. Ai rechigné à la lumière comme les autres et connu ma première marée d’équinoxe. Ai cherché à attraper les doigts, les objets qu’on me tendait. Ai sucé, appris à serrer,  déchiqueter,  observer avant de saisir. Ai chapardé des sourires. Ai Continuer la lectureça ne s’arrêterait jamais si on voulait

corps vents fenêtres

Elle levait les yeux pour la voir elle le faisait souvent pour attraper la lumière du dehors et les nuages qui semblaient faire partie du verre elle pensait à la suite très loin dans le futur elle pensait à d’autres lieux qu’elle habiterait d’autres fenêtres comme celle de la cuisine de la rue Pouget grande avec volets verts donnant sur Continuer la lecturecorps vents fenêtres

parler c’était quoi alors

Parler c’était quoi alors        rien         la table toujours encombrée avec de la vaisselle des miettes de pain des objets à traîner parce qu’avec des enfants on ne peut pas garder une maison impeccable même si on s’acharne          les bruits de succion quand on mangeait la soupe le soir        Père avait une voix lourde et rageuse pour le peu qu’il disait         on Continuer la lectureparler c’était quoi alors

marge étroite entre deux murs

Ce trouble qui envahit à emprunter le sentier, ce vague sentiment d’insécurité à se retrouver corps soudain contenu dans une marge étroite définie par deux murs suffisamment élevés pour dominer le marcheur et abondamment couronnés de lianes et autres plantes envahissantes au point de procurer une impression de jungle – fouillis adhérant ou griffu retombant en de nombreux points le long Continuer la lecturemarge étroite entre deux murs

exploration des limites

Trou : paraît sans fond au premier abord, masse de matières indistinctes avec sur les flancs des indices de présence de tiges métalliques (coupantes, dangereuses), impression de tressage complexe qui s’amplifie encore à s’approcher des barrières rayées rouge et blanc interdisant l’accès, bien possible qu’il y ait des rats ou d’autres genre d’animaux qui s’engouffrent dans la canalisation fracturée bientôt visible Continuer la lectureexploration des limites

par le devant du corps debout

DEVANT y penser toute la nuit en rêver et l’écrire au matin DEVANT quelque chose d’important pour éviter de se prendre les pieds dans le tapis DEVANT et non derrière ou sur le côté ou pire encore en l’air ou dans le suspens de l’air DEVANT tout ce qui s’offre au sol par le DEVANT du corps qui voudrait avancer Continuer la lecturepar le devant du corps debout

béton gris raide forcément poussiéreux

Ce souvenir persistant chez elle d’une dalle en béton brut dépourvue d’habillage (la maison encore en construction alors qu’elle était haute comme trois pommes et commençait à trottiner pour de bon), dalle ponctuée de minuscules trous et graviers incrustés dans la masse d’où s’étaient élevés progressivement les murs (le père se lamenterait plus tard à propos du peu de matériaux Continuer la lecturebéton gris raide forcément poussiéreux