A propos de Françoise Renaud

Parcours entre géologie et littérature, entre Bretagne et Languedoc. Certains mots lui font dresser les oreilles : peau, rébellion, atlantique (parce qu’il faut bien choisir). Romans récits nouvelles poésie publiés depuis 1997. Vit en sud Cévennes. Et voilà. Son site, ses publications, photographies, journal : francoiserenaud.com.

#L2 | Là-bas

Le voyageur ne sait jamais à quoi s’attendre. Le voyageur voyage, il ne sait pas ce qui va arriver le jour suivant. À chaque étape, le voyageur se demande de quoi seront faits sa nuit son sommeil. Pas de rendez-vous, de lettre à porter, de marchandise à livrer. Il a rejoint une zone habitée par besoin de compagnie ou nécessité Continuer la lecture#L2 | Là-bas

#P2 | généalogies

Familles, saintes familles, familles chéries, ah vous croyez ça vous, familles folies, familles je vous fuis, aïeux à peine ou jamais connus, grands-parents paysans, père mère dits papa maman balbutiés au début, papa maman frérot frangine ces liens sacrés de famille, famille mais pourquoi elle a dit moi je suis très famille, ah non pas moi, surtout pas, et la Continuer la lecture#P2 | généalogies

#P1 | miroitements

(innombrables lieux où j’ai dormi, voir ce qui vient) tout de suite odeur de draps sales – y avait-il seulement des draps ? –, tenace cette odeur de linge qui a longtemps servi dans lequel on peine à se coucher, moisi, odeurs corporelles, draps chiffon, draps de chambre d’étudiant où s’attarder rien qu’un bout de nuit sans importance étranges résonnances quand Continuer la lecture#P1 | miroitements

#L1 | Là-bas

Partir bien avant l’aube pour atteindre ce point du paysage avant la fin du jour. Ce point, là-bas. Loin — difficile de donner une mesure exacte de la distance à parcourir. D’un bond se redresser, attraper le sac, le lancer sur l’épaule. Sentir combien il pèse. Quitter le repaire (abri sous feuillages ou au milieu des vignes, auberge, bergerie, pan de Continuer la lecture#L1 | Là-bas

#0 prologue | déferlante

eau fastueuse autour du corps, eau enveloppant le corps, le corps dans la nage parti il y a déjà une heure de la plage en direction du large dans un rythme puissant, allongement sous la surface liquide et regard au fond sans se fixer, toujours vagues en fonction de l’heure et du vent (le corps le sait), en fonction de Continuer la lecture#0 prologue | déferlante

la blancheur

Un long moment elle a parcouru les endroits de sa vie récente à la recherche d’un événement cyclique, d’une circonstance, d’une simple scène qu’elle aurait observée ou à laquelle elle aurait participé et qui se serait répétée suffisamment de fois pour être saisie en écriture et restituer une sensation de temps écoulé, mais elle n’a pas trouvé. Depuis qu’elle vit Continuer la lecturela blancheur

ce manque

… ce manque encore qui revient… ce manque qui va finir par gratter creuser le moral comme le filet d’eau acide lime le rocher… ce manque de contact avec les autres, avec la peau des autres, seul, avec le poudroiement de soleil dans la fenêtre ou la petite pluie ou le crachin qui a investi le dehors et brouillé le Continuer la lecturece manque

appel de Managua

— écrire téléphone fiction, se débrouiller avec les personnages, le récit viendra, mais quand on cause dans cet appareil, à aucun moment on ne voit l’autre, et c’est flippant à force, surtout quand on n’a pas vu notre interlocuteur depuis longtemps et qu’on n’a plus idée de son visage, sans compter les coupures, les interférences, les décalages, les grésillements inopinés qui Continuer la lectureappel de Managua

eux

VIEUX FAUSTIN Structure robuste des pommettes accentuant le maigre des joues, indice d’âge avancé mais on ne pourrait pas dire exactement. Oreilles plaquées sous les cheveux hirsutes (genre poil de chèvre), bien orientées pour saisir les bruissements de forêt. En son for intérieur : un son, un son à la tessiture rauque associée à l’image d’un animal qui rôde près de Continuer la lectureeux