A propos de Françoise Renaud

Parcours entre géologie et littérature, entre Bretagne et Languedoc. Certains mots lui font dresser les oreilles : peau, rébellion, atlantique (parce qu’il faut bien choisir). Romans récits nouvelles poésie publiés depuis 1997. Vit en sud Cévennes. Et voilà. Son site, ses publications, photographies, journal : francoiserenaud.com.

autobiographies #10 | vie qui bat

Elle regarde l’hiver par la fenêtre. Elle reste dans la cuisine où il fait le plus chaud. Elle met souvent la main sur sa poitrine. Elle veut savoir si son cœur bat encore. Elle a quitté son village il y a presque dix ans. Elle se souvient du jour où elle a pris le car avec sa petite valise en Continuer la lectureautobiographies #10 | vie qui bat

autobiographies #09 | vol de nuit

de l’épaisseur du silence surgissent des formes imprévues, et la nuit en rajoute encore à l’indécision et à la crainte de s’engager dans ces passages ignorés au ras de petits squares mal fréquentés, ces venelles, ces courettes nichées à l’intérieur des bâtiments, ces avant-toits protégeant des portes, ces couloirs étroits mal éclairés sur lesquels s’ouvrent d’autres portes derrière lesquelles il Continuer la lectureautobiographies #09 | vol de nuit

autobiographies #08 | intérieurs cuisine

cuisine 1 c’était au bord de la route, un champ couvert d’herbes, un pré ; des cèdres bleus couchés en désordre près d’un fossé au loin ; quand il n’y avait pas encore de constructions, la campagne quoi ; fondations en 1950 et pose du toit pour qu’il existe un intérieur ; surtout la cuisine ; manger se chauffer tresser l’osier en hiver ; odeur du Continuer la lectureautobiographies #08 | intérieurs cuisine

autobiographies #07 | bruits de porte

Porte de la chambre des enfants vue du dedans. Je suis couchée dans le lit. La porte est à l’opposé dans la diagonale de la pièce, presque angle gauche du mur. Quand il est l’heure dormir, je fixe le rai de lumière à la limite du parquet – un beau parquet en chêne, presque trop beau pour une maison aussi Continuer la lectureautobiographies #07 | bruits de porte

autobiographies #06 | voyage à Sumatra

ça cahote, ça ébranle les reins, route si mauvaise qu’on doit s’agripper au bord de sièges comme on peut – dormir pas question –, heure après heure ça percute contre les os, ça entame le courage, les sièges en bois recouverts d’une maigre mousse enveloppée de moleskine souvent déchirée, voire éventrée, le véhicule à bout d’usage au moteur cependant increvable Continuer la lectureautobiographies #06 | voyage à Sumatra

#L13 | Réécrire

Six jours à rebours. Comment se souvenir ? Le jour de sa rencontre avec le vieil homme sur sa mule ? Ou plutôt le jour où il a croisé la petiote dans le pré des brebis escortées de leurs petits ? Il la revoit, jolie gosse insouciante, en train de sautiller entre les bêtes et leur force paisible s’impose à lui telle une Continuer la lecture#L13 | Réécrire

autobiographies #03 | moi arbre

Moi arbre participant à la géométrie du paysage. Moi arbre né loin derrière le temps rampant d’abord sous le sol infertile de ce bout de terre de l’ouest, patient, résistant, m’élevant depuis mes racines tel un personnage s’appuyant puissamment sur ses mains pour se redresser, mes pousses tiges ramures enfin capables de grandir à travers l’air pour rejoindre le ciel et Continuer la lectureautobiographies #03 | moi arbre

#P12 | 56 fois Bass Rock

1 Rochers de couleur blanc-grisâtre à cause des excréments d’oiseaux 2 Drôle d’idée que de se donner rendez-vous dans un pays où on n’a jamais mis les pieds en visant un point sur une carte. Heureusement qu’ils avaient choisi un jour et une plage horaire suffisamment large pour que chacun pût atteindre ce point au terme d’un assez long voyage Continuer la lecture#P12 | 56 fois Bass Rock

#L12 | Navigation à vue

et les rivages, et les îles deux syntagmes, chacun constitué de la plus simple des conjonctions de coordination, d’un article et d’un nom / pas de majuscule, pas de verbe / pourtant on peut dire que c’est une phrase, on le sent – mais qu’est-ce que c’est qu’une phrase ? –, on ressent que ça raconte une histoire, en tout cas un Continuer la lecture#L12 | Navigation à vue

#P11 | Toile de nuit

Le voyageur dépasse les lisières de sa carte géographique, il ne s’aperçoit de rien, il continue à marcher, il marche encore longtemps avant d’atteindre  les premières maisons. Il est habité d’un fort désir de rencontrer les habitants, d’être accueilli, nourri, réconforté, mais rien n’arrive. Nul ne se manifeste, ne vient à sa rencontre. Le lieu semble vide d’âmes et la Continuer la lecture#P11 | Toile de nuit