A propos de Émilie Marot

J'enseigne le français en lycée où j'essaie envers et contre tout de trouver du sens à mon métier. Heureusement, la littérature est là, indéfectible et plus que jamais nécessaire. Depuis trois ans, j'anime des ateliers d'écriture le mercredi après-midi avec une petite dizaine d'élèves volontaires de la seconde à la terminale. Une bulle d'oxygène !

#40jours #18 | la maison rouge

Cheveux d’enfants emmêlés de mer de sable de soleil. Peaux rougies. Il faut rentrer. Il est tard. On rassemble seaux pelles râteaux serviettes empesées de sel pliants de plage. Démarche prudente de l’arrière-grand-mère sur la plage empêtrée de galets goémon trous dans le sable. La grand-mère lui tient la main ; la grand-tante veille à côté tout en jetant un œil Continuer la lecture#40jours #18 | la maison rouge

#40jours #17 | femmes-jardins

Sept heures. Pour elle, la journée a commencé à six. Dans la fraicheur du jardin. En attendant les clients du jour, elle est assise sur le seuil d’une devanture de magasin encore fermé. Coffre de la voiture ouvert. Chargé des fruits et légumes du jour. Comme chaque matin, elle regarde la rue à l’affût de ses âmes errantes à qui Continuer la lecture#40jours #17 | femmes-jardins

#40jours #14 | permis d’exister

Sans-papiers. Il a tout laissé derrière-lui : les morts et les vivants dans les décombres de Petit-Trou-de-Nippes ; le port de pêche et son embarcation, ses filets, ses lignes, les livres de la petite bibliothèque Dany Laferrière ; sa vie de peu, sa vie de presque rien, assommé de malheurs accumulés. Sans-papiers. Il a tout perdu pendant le voyage. Alpagué, molesté, dépouillé de Continuer la lecture#40jours #14 | permis d’exister

#40jours #13 | rouille

Au détour d’un chemin-chien, un container maritime échoué là, charroyé d’on ne sait où. Piqué de roux de rouge de rouille, étoilé constellé de taches rousses, roussâtres, ocres ou orangés, tirant parfois sur le brun. Troué de petits cratères aux bords brûlés éclaboussés de rouille sang séché comme un trou de cigarette un trou de soleil éblouissant dans le métal Continuer la lecture#40jours #13 | rouille

#40jours #12 | effritements

La ville s’effrite. Trou gris dans le mur écru. Mise à nu du béton. Un trou en forme de pas. L’empreinte d’un pas dans le mur. Sous le pas, un autre trou en forme de fer à cheval ou de coquillage. Mur-fossile défait. Et autour encore d’autres trous, plus petits ceux-là. Comme des impacts de balles. La ville s’effrite. Là Continuer la lecture#40jours #12 | effritements

#40jours #11 | la Ville-Feuille

La torpeur du soleil pesait sur la ville endormie. Je déambulais depuis bientôt une heure au hasard des quartiers, dédales de rues et de friches et j’avais réussi : j’étais perdue. J’avais défait le Territoire. J’avais brouillé les pistes. J’avais laissé la ville reprendre le contrôle. A ma façon, je marronnais. J’éprouvais déjà, fugacement, ce serrement au ventre, avant-goût de cette Continuer la lecture#40jours #11 | la Ville-Feuille

#40jours #10 | du peu de souvenir de Nantes

J’ai peu de souvenirs de Nantes de ces deux années-là. Des points de repères vides de vie et de mémoire. Géographie restreinte de mes trajets quotidiens de la rue de Verdun au lycée Clemenceau. Et sur la route : la Cathédrale, le Cours Saint-Pierre, le Musée des Beaux-Arts et au bout, le Jardin des Plantes. Une mémoire de plans et de Continuer la lecture#40jours #10 | du peu de souvenir de Nantes

#40jours #09 | bouts de vie dans la ville

1 Entre la cathédrale et le PMU, c’est son territoire. Ecouteurs vissés sur les oreilles, sourd aux passants, il balance dodeline se déhanche, le corps tout entier à la musique qu’il écoute, un sourire accroché au visage. Parfois, il déambule dans les rues de la ville, une cannette à la main, corps chaloupant. 2 Le visage ridé, plié et replié Continuer la lecture#40jours #09 | bouts de vie dans la ville

#40jours #08 | protocole bustes et statues

Sur le boulevard maritime, Gerty Archimède, première femme avocate des Antilles françaises, assise tout en bronze dos à la mer visage tourné vers le tribunal de Basse-Terre : devant elle, dans le tombant du soleil, les quatre chevaux du rond-point se cabrent face au flux des voitures ; à sa gauche, la gare routière où vrombissent les moteurs des bus à l’arrêt Continuer la lecture#40jours #08 | protocole bustes et statues