A propos de Elisabeth Saint-Michel

C'est ma quatrième ( cinquième?) participation aux ateliers proposés par François Bon. Je trouve cela particulièrement énergisant. J'anime moi-même des ateliers d'écriture à Villeneuve d'Ascq (Hauts de France) au sein de l'association Filigrane. Je suis aussi enseignante auprès de jeunes enfants porteurs de handicap. Côté écriture personnelle, j'ai publié deux romans et deux recueils de nouvelles dont le dernier, "disparaître ici" est sorti en mars 2021.

#P5 Chute libre

Le nœud ne se desserre pas, trop serré le nœud, ici, dans la gorge, au carrefour des respirations, affole les sens, excite les fêlures. Pas de main à saisir, pas de rampe, pas de filet, aucun accessoire estampillé sécurité, aucune issue de secours, parcours obligé, piste noire savonnée, savonnée en noir, je prends de la vitesse, l’ivresse me cajole, pas Continuer la lecture#P5 Chute libre

#L4 | Mes inséparables

De Stefen Zweig, le joueur d’échecs, 24 heures de la vie d’une femme, échapper à la folie, au désastre du total isolement, à l’addiction. Une traversée puissante du mental. De Sylvie Germain, nuit d’ambre, Opéra Muet, densité, violence des états d’âme, densité, contact charnel avec la nature, limites repoussées, démolitions intérieures. De Nancy Huston, dolce agonia, instruments des ténèbres, champs Continuer la lecture#L4 | Mes inséparables

#P3 Crevettes bouquet

À la vue des crevettes, le vieux regard s’émerveille. Elles sont là, en couronne, luisantes, la queue prédécoupée, la tête déjà éliminée, elles n’ont plus d’antennes et on est dispensé de croiser leurs yeux morts avant de les décapiter. Au centre du petit hémicycle, trône un minuscule godet de mayonnaise. Elle s’extasie, quelle bonne idée, des crevettes. D’en avoir mangé Continuer la lecture#P3 Crevettes bouquet

#L3 | sous les pavés

En v’là un autre avec son bac à illusions sous le bras on le voit à son allure j’avais la même il y a deux ans de ça quand c’est moi qui me pointais en câlinant les orties il y en avait à l’époque je caressais les feuilles pour frimer le genre même pas mal pour épater qui on se demande Continuer la lecture#L3 | sous les pavés

#L2 Cochon pendu

Où allaient ces gens qui étaient dans le train tout à l’heure, le train dont les voies n’offrent pas de déviation possible, parcours programmé, aiguillages réglés, itinéraire fiable et sans surprise. Où allaient-ils ? La question l’a effleuré, sous le pont, alors que le souffle du TGV avait à peine eu le temps de le surprendre. Étaient-ils confortablement installés, tickets en Continuer la lecture#L2 Cochon pendu

Déchets désenchantés

Au-dessus du tas, quatre chaises, fraîchement débarquées, leurs pieds retournés invoquant l’assistance d’un ciel nuageux qui ne peut rien pour elles, des planches arrachées au squelette de leur meuble d’origine, griffées, éraflées, des vis éparses transperçant leurs veines, une carcasse d’ordinateur, la carte mère à l’air, une machine à coudre, deux cadres jumeaux dont les vitres ont explosé et font Continuer la lectureDéchets désenchantés

majorelle ou indigo

C’est ici. Une grand-porte d’un bleu délavé s’ouvre sur un porche. Au fond, on devine une cour. Se représenter la scène depuis le départ, depuis le moment où il a claqué la porte d’un chez lui parmi d’autres, depuis le moment où il s’est mis en branle, ses grandes enjambées n’affirmant rien. En longeant le canal jusqu’à l’écluse, le vivre Continuer la lecturemajorelle ou indigo

Déclinaisons nocturnes

… l’humidité perce à cœur le matelas qui était tiède tout à l’heure, un matelas fin, posé à même le métal de la remorque du camion, il charrie des frissons…… un bitume mal lissé, le dos qui s’y pique, les membres endoloris, une couverture jetée à la va-vite, l’air qui se refroidit quand avance la nuit, les restes de flonflons Continuer la lectureDéclinaisons nocturnes

Miroir intense

Les maisons se dérident, leurs étages plongent en toi à rebours, la rue entière se gondole, offrant aux promeneurs la farce rieuse des combles devenues caves, des lucarnes en apnée, des riverains qui marchent sur la tête et des cyclistes dont les vélos planquent leurs roues derrière de hautes herbes qui tombent du ciel. Les briques, réputées moroses se prennent Continuer la lectureMiroir intense

Nocturne

Des racines grises sur la même toile que des mèches qui, elles, n’ont pas encore perdu leur teinture, des cheveux secs tenus en arrière par un élastique sans fantaisie. Le reste du visage de la femme qui marche est absorbé par un fil tendu sur le trottoir.En son for intérieur : une forêt vierge, libre en tous sens, de la canopée Continuer la lectureNocturne