A propos de Anne Dejardin

Projet en cours "Le nom qu'on leur a donné..." Résidences secondaires d'une station balnéaire de la Manche. Sur le blog L'impermanence des traces : https://annedejardin.com. Né ici à partir du cycle«Photographies». Et les prolongations avec un texte pour chaque nom qui dévoile un bout de leur histoire. Avec audios et vidéos, parce que des auteurs ou comédiens ont accepté de lire ces textes, l'énergie que donnent leurs voix. Merci. Voir aussi sur Youtube.

#été2023 #10bis | Elle ou moi, mais sans lui.

Ce qu’il en pense, le personnage ? C’est vite vu : il ne pense pas ! C’est ce que l’auteur a décrété, que ses personnages ne pensent pas en son absence ! Comme ça sans demander l’avis de personne, juste parce que ça l’arrange. Peut-être qu’à Ben ça lui plaît de pêcher toute la nuit sans penser et au sourd-muet de dormir en ronflant. Continuer la lecture#été2023 #10bis | Elle ou moi, mais sans lui.

#été2023 #10 | Sans lui, elle n’est pas.

Que fait le personnage principal quand l’auteur n’est pas là, quand il ne s’occupe pas de lui, d’elle. Le problème dans ce cas-ci est complexe. Habituellement l’auteur connait son personnage principal. Dès qu’il y pense, il le construit. Dans l’histoire en cours, le narrateur et l’auteur se confondent. L’un et l’autre enquêtent. L’un et l’autre cherchent le personnage principal. L’auteur Continuer la lecture#été2023 #10 | Sans lui, elle n’est pas.

#été 2023 #05 | Réunion de quartier. Deux versions

Codicille : J’avais d’abord fait une version réduite, compressée, mais améliorée, je l’ignore. Pour ceux qui l’ont demandée, voici en seconde partie la version longue d’origine. Version courte « À lui qu’il est maintenant, le terrain, c’est sûr ! » On comprend mal ce qu’il dit, à cause de sa barbe pas soignée. Elle lui donne l’air d’un vieux loup de mer, c’est ce Continuer la lecture#été 2023 #05 | Réunion de quartier. Deux versions

#été2023 #04bis | précisément.

Copyright Anne Dejardin
  1. Dans la nuit de samedi à dimanche, et non pas celle du vendredi au samedi, c’est à ça qu’elle pense au réveil, ce n’est pas la nuit de vendredi à samedi, et à l’instant de reprendre pied dans la réalité, le soulagement peut commencer l’envahissement du corps qui est resté dans le contexte du cauchemar, parce que ce n’est pas la nuit de vendredi à samedi, et alors le soulagement peut continuer à progresser dans les muscles, dans la chair, dans la tête, la respiration redescendre dans le ventre, ce n’est pas un rêve prémonitoire, de ce qu’elle disait la mère, l’inéluctable du terrible en préparation dont on venait de vivre un avant-goût, parce que c’était le rêve de la nuit du vendredi à samedi. Elle entend la phrase dans sa tête. Essaie de s’assurer qu’il s’agit bien de la nuit du vendredi au samedi, essaie de prononcer les mots, la nuit du vendredi au samedi, mais elle doute à présent. Parce que c’est même sonorité. Même la nuit du jeudi au vendredi. Elle hésite. Il faudrait lui demander. Depuis qu’elle ne peut plus l’interroger, le monde a perdu toute stabilité.
  2. Dans la nuit de samedi à dimanche, et si elle veut y rester dans ce nouvel habitat, ce ne devra pas surtout pas y dormir pour la première fois un lundi. S’agit-il de la nuit du dimanche au lundi ou du lundi au mardi. Elle l’ignore et personne à interroger. Des balises dont elle n’a pas mémorisé les codes.
  3. Dans la nuit de samedi à dimanche l’odeur étrangère, bizarre, qui n’est pas familière comme celle de mazout qui vous sautait à la gorge dès qu’elle entrait dans sa maison, à la gorge, au ventre, qu’elle était la seule à sentir, tu ne sens rien, tu t’en souviens quand même, non, il n’a pas remarqué, elle a le nez qui gâte, pour reprendre une expression entendue dans l’enfance. Malgré la porte bien fermée sur le garage accolé à la maison et le petit couloir et tout le salon et encore le corridor, l’odeur de mazout, à peine la porte poussée qu’il a fallu soulever un peu à cause de l’humidité, depuis l’enfance c’est la même voix qui parle de l’humidité à cause de la rivière au fond du jardin en bas des escaliers.
  4. Dans la nuit de samedi à dimanche, la même odeur d’humidité on pourrait penser, et donc il y aurait quelque chose de familier, de rassurant, et non, chaque humidité a sa particularité odorante. Elle a plongé son nez dans le t-shirt qui lui sert de robe de nuit. L’odeur de sa peau la rassure. Si elle ne s’habitue pas, elle pourra toujours partir, lui rendre la clé et le remercier.
  5. Dans la nuit de samedi à dimanche, elle se tourne et se retourne. Le lit est large, l’hôtel luxueux. Il dort à côté d’elle. Demain il repartira. Il ne donnera pas signe de vie jusqu’à la prochaine fois. Son corps à elle est en paix. Sa tête moins. Il la fait toujours jouir. Ça reste un mystère. C’est peut-être pour cela qu’elle vient le retrouver, pour comprendre. L’alcool et le spectacle l’ont épuisé. L’amour aussi peut-être. Elle a chaud. Elle voudrait boire. Sa gorge comme fichée d’aiguilles. Elle a peur de le réveiller. De se cogner dans le noir aussi. On lui a donné une suite. Elle est arrivée tard, elle ne sait même pas dans quelle direction est la salle de bains.
  6. Dans la nuit de samedi à dimanche, elle marche dans la neige. Elle est hors du froid qui resserre tout le paysage et le sol sous ses pas. Il faut prendre garde à ne pas déraper. Elle est hors tout raisonnement commun. Elle pleure à gros hoquets. Elle sent que c’est de cela qu’elle a besoin. Elle est hors de la peur du noir, de la peur de ne pas retrouver son chemin, de la peur de se faire agresser. Elle est seule dans la nuit. Close sur sa peine.
  7. Dans la nuit de samedi à dimanche, elle n’est pas née. Ils ont attendu le matin pour la césarienne. Elle était un gros bébé. Un beau bébé. C’est ce qu’on dit des nourrissons qui n’ont pas fait le trajet eux-mêmes, qui n’ont pas dû se frayer un chemin, à qui on a ouvert la porte. Est-ce pour cette raison que tout lui demande du temps ? Qu’on l’a toujours traitée de rêveuse ? Qu’on l’a éduquée à coups de dépêche-toi ? Qu’elle a choisi de photographier plutôt que de filmer ? Arrêter le temps sur l’image. C’est un art qui lui convient, la justifie toute entière. Écrire aussi si la narratrice le décide ainsi.

#été 2023 #04 | A vendre.

Elle le suit dans les escaliers. Ils ont salué, sont passés devant lui. Peut-être lui a-t-elle serré la main. Elle ne s’en souvient plus. C’est normal, parce qu’il reste en dehors, comme un personnage secondaire conscient que c’est à l’autre qu’échoit le premier rôle, c’est son métier après tout, normal qu’il le laisse faire, passer devant elle dans les escaliers, Continuer la lecture#été 2023 #04 | A vendre.

#été2023 #02bis | Chez soi

Elle écrirait sur la notion de chez soi depuis un lieu qu’on lui avait prêté, qu’elle pouvait occuper pour une durée indéterminée sans bail ou autre accord signé, depuis lui devant elle claudiquant, c’est ce qu’elle aurait pensé en marchant derrière lui, qu’il était estropié. La fabrication du chez soi… Pour se sentir chez soi, ce qu’il faut, ce qu’il Continuer la lecture#été2023 #02bis | Chez soi

# été 2023 #01bis | Ce qu’il se demandait.

Avait-elle connu cela elle aussi ? Ce grand surgissement impératif et qu’il faudrait ne faire que cela quand tout le reste serait reporté à plus tard  n’aurait plus d’importance et ce serait jusqu’à perdre existence tombé dans le néant pour ouvrir toute la place du corps au-dedans qui dicte depuis la tête ou depuis le ventre comme cela l’avait dépassé le Continuer la lecture# été 2023 #01bis | Ce qu’il se demandait.

#été 2023 #01 | Face mer.

Il ne pouvait que l’imaginer. Et forcément elle aurait écrit. Elle ne pouvait qu’écrire, marcher, photographier et écrire. Sinon qu’aurait-elle fait d’autre, enfermée dans cette caravane aussi confortable qu’une épave, y vivant seule avec son chien. Pour le chien, il hésitait encore, depuis qu’il avait lu le blog de Fabienne Swiatly et pourquoi elle avait fait le choix de se Continuer la lecture#été 2023 #01 | Face mer.

#0 Prologue | lui, l’aimé

C’est un livre qu’on lit avec le corps, depuis le corps, depuis les mouvements du dedans. Les mots choisis et les images, les dialogues aussi, tout y contribue. Il y a identification au corps de l’héroïne, jeune et rebelle au début, qui découvre la désobéissance, qui découvre l’amour, le plaisir, puis le corps fracassé et quand tout avenir n’est plus Continuer la lecture#0 Prologue | lui, l’aimé

#techniques #03 | Ce qui est sans existence.

Derrière les silences, il y a le nécessaire, l’inespéré, celui qui fait taire les autres, celui qui ouvre, qui mène, qui définit l’espace ambiant, on l’appelle silence lui aussi, quand il n’est que l’interruption du bruit principal, celui qui dicte, la voix de tête, et si lui se tait, on nomme l’ensemble silence, quand pourtant tant d’autres continuent le vacarme, Continuer la lecture#techniques #03 | Ce qui est sans existence.