A propos de Anne Dejardin

Projet en cours "Le nom qu'on leur a donné..." Résidences secondaires d'une station balnéaire de la Manche. Sur le blog L'impermanence des traces : https://annedejardin.com. Né ici à partir du cycle«Photographies». Et les prolongations avec un texte pour chaque nom qui dévoile un bout de leur histoire. Avec audios et vidéos, parce que des auteurs ou comédiens ont accepté de lire ces textes, l'énergie que donnent leurs voix. Merci. Voir aussi sur Youtube.

Effacer la buée

1. le jour comme tracé de l’éclair dans la lézarde du mur contre le lit comme toucher du doigt le jour qui se lève. 2. le lit à baldaquin, rêve devenu oppression, les quatre torsades de bois travaillé, sculptés, métamorphosés dans la nuit en barreaux. 3. la buée sur la vitre en plus du rideau transparent pour barrer la vue, Continuer la lectureEffacer la buée

Qui, elle ?

Elle arrive quelque part. Arriver et quelque chose dans son corps le porte, l’annonce. Elle est arrivée quelque part. Même si c’est momentanément. Même si c’est un endroit où la mort rôde. Juste en descendant du train en posant son sac à dos sur le quai, qu’elle sache où elle va ou pas. Un bref instant son corps l’affirme, elle Continuer la lectureQui, elle ?

Bouchon

Eau qui coule et penser d’abord à celle-là, une eau qui bouge, glisse, fuit, qui n’est jamais la même. Le bouchon orange fluo qu’elle emporte entraînant le regard, de la main retenir la ligne un peu par un fil transparent, invisible, finir par le sortir de là pour le rejeter en amont précisément à l’endroit d’où il vient et ce Continuer la lectureBouchon

Devant la cuisinière.

Elles sont deux devant la cuisinière. Dans la cuisine la cuisinière et elles à deux devant. La mère n’est pas plantée devant la cuisinière. Le corps de la mère bouge et le corps de l’autre pas. Le corps de l’autre est celui de la fille. Pour la mère le corps de l’autre est celui de sa fille. La mère le Continuer la lectureDevant la cuisinière.

La foire, c’est forcément de Liège…

C’était chaque année aux environs de la Toussaint dans le mois de novembre ou un peu avant : la foire. On se le disait entre nous, c’est la foire, je vais aller à la foire, la foire de Liège, avec tous ces manèges et toutes ces baraques pour manger de tout, des hamburgers déjà mais aussi des croustillons et des lacquemants Continuer la lectureLa foire, c’est forcément de Liège…

Comme chaque matin

Le rire qu’il aura et qui ne consolera pas à cause de la moquerie qu’il véhicule depuis ses grandes dents découvertes en riant, blancheur préservée par-delà les années, pour indiquer qu’il faut garder distance, ne pas attribuer valeur à ce qui s’est passé, aux paroles de la vieille, qui finit par perdre même intention de consolation pour ne plus qu’être Continuer la lectureComme chaque matin

Raconter sa vie au téléphone ou ce que le téléphone dit de sa vie.

Ce que ça dirait du dedans des familles, la place qu’on attribue au téléphone. Longtemps sa place est dans l’entrée. Le téléphone à cadran à trous est posé sur une petite table en céramique et fer forgé, porte-journaux où l’annuaire est seul. Et l’endroit où est sa place, fixe à cause du fil et il faut une prise spéciale pour Continuer la lectureRaconter sa vie au téléphone ou ce que le téléphone dit de sa vie.

Au 89…

Amie de Madeleine Deux cercles de poudre bleue de la marque Bourgeois et rouge à lèvres même marque mais rose et tout autour du blond crêpé figé. En son for intérieur : une décapotable et un amoureux qui vient la chercher pour l’emmener danser sur Frank Sinatra. Elle a augmenté le bleu, agrandi le cercle. Les enfants n’y verront rien, c’est Continuer la lectureAu 89…

Dame à bibi rouge

Par elle subjuguée, ce que ça dit de moi. Pas irritée par tant d’ostentation d’elle, vêtue de rouge, mais ce qu’on voit en premier, c’est le chapeau rouge aussi, à voilette relevée bien sûr, cheveux jais tirés en arrière pour que le crâne accueille au mieux le bibi, lui laisse la vedette, vêtements d’un autre temps, et pourtant elle pas Continuer la lectureDame à bibi rouge

Ensemble

Foule visages et corps restaurant  ̶  cantine plutôt  ̶  menu unique douze euros cinquante avec fromage et café boissons comprises cidre ou vin rouge la porte est dure il faut une poigne d’homme elle reste ouverte pas pensé à refermer derrière lui le froid s’engouffre les corps d’hommes  massés au bar avant les grandes tablées là où il restera de Continuer la lectureEnsemble