Il passe la lourde porte en bois qu’il a toujours connue. La malheureuse a capitulé face aux courants d’air tant elle a été ouverte et fermée toutes ces années. Ses gonds pleurent à chaque mouvements et ne savent plus très bien qui, de la porte ou du mur, les retiendront.
Il se dit qu’il serait temps de les changer. Il se dit aussi de ne pas y songer.
Il s’avance à pas lourds dans le couloir lorsque la pendule tique. Ce bruit se répercute dans le vide et le surprend dans un sursaut. Elle n’a pas changé, toujours droite, grande, majestueuse dans son hêtre. Elle semble vivante mais ne réagit qu’aux tremblements du plancher. Il la quitte du regard pour continuer.
Devant lui, l’intérieur se présente dans la pénombre et se devine dans l’à-peu- près. En s’avançant, il reconnait l’odeur de l’ancien. Il reconnaît l’ombre de l’armoire où étaient rangées les chaussures. Il reconnaît le crochet sur lequel pend le parapluie bleu qu’elle lui avait donné pour son anniversaire et il n’a pas bougé, pas plus qu’il n’a vieilli.
Depuis qu’il est entré, il n’y a que le silence qui lui répond. Ses pas résonnent et le dérangent car il a peur de réveiller ce passé endormi. Il décide alors d’aller vers le salon. Le carrelage incomplet l’accueille comme il peut : en certains endroits, des carreaux sont défaits mais cela ne semble déranger personne : la lumière n’entre plus, la vie a déserté le lieu depuis longtemps et le temps, lui, n’en a cure…tant qu’il peut passer.
Les meubles sont toujours là, fidèles et immobiles. Une grande table ronde trône au milieu de 4 chaises à barreaux. Ils ont l’air d’attendre que quelqu’un daigne les remarquer. Lui n’y prête pas attention et lève les yeux au plafond où le lustre qu’il n’aimait pas est toujours là. Des petits morceaux de cristal pendent gentiment de la structure. Il les remue pour entendre leur son si pur, sans les casser de grâce ! L’ampoule a disparu.
Il agite la main dans ses cheveux, inspire profondément et se retourne vers la fenêtre du jardin où les toiles d’araignées ont pris leur quartier. Ici, l’abandon a revêtu ses plus beaux atours.
Il s’approche du fauteuil en velours vert et s’y assied. La poussière le fait éternuer. Devant lui, il voit le miroir entouré de branches entrelacées qui lui rappelle sa vie passé. Il se souvient. Il regarde l’armoire où se trouve la collection de petites tasses en porcelaine pour s’assurer que tout est là. Rien n’a changé. Tout à vieilli.
Il entend des petits pas qui courent dans le plafond. Une souris ou l’autre, c’est toujours ça de vivant, il se dit.
Tout à coup, un courant d’air s’engouffre dans la pièce. Il se lève, elle est là ! Il la voit ! Elle arrive toute fine dans sa robe blanche, il entend son rire lointain, subjuguée, elle resplendit. Ses pieds ne font qu’effleurer le monde tant elle tourne et retourne.
Il sent son odeur de pain grillé, il sent sa main le caresser, il voudrait l’attraper et l’étreindre, il s’approche de la fenêtre et dans cet élan tant espéré, son coeur bondi, il la saisit, il ralentit… Jusqu’à ce que ses doigts se referment sur un voile blanc et transparent. Son coeur tombe. Elle s’est volatilisée. Envolée. Echappée.
Il soupire face à ce monde redevenu « présent ».
Je me suis laissé emportée par le texte.
Impression étrange car il est en écho avec celui que je viens de poster.
J’ai aimé cet entrelacement passé présent.
Merci beaucoup de m’avoir lue. Je n’arrive pas à trouver le texte que vous avez posté (je ne suis pas très douée pour tout cela) mais ça me plairait de le lire…..