Arkhangelsk, voyage subarctique promis. Arkhangelsk, un avion à hélice. Arkhangelsk, de la tôle qui vibre. Arkhangelsk, du froid qui fait craquer, à certaines saisons. Arkhangelsk, les trottoirs éclatés. Arkhangelsk, les couloirs qu’on n’entretient plus. Arkhangelsk, les façades dont on se moque gentiment puisque tout se passe derrière. Arkhangelsk, à cette saison-là, jusqu’à plus de minuit l’immense et lumineux estuaire de la Dvina. Arkhangelsk et, sur les bords de la Mer blanche, le délicat travail du bois clair pour en faire l’oiseau du bonheur. Arkhangelsk, Ptitsa stchastia.
Le laisser s’envoler. Un vol plané depuis une mezzanine qui dure tout le temps que peuvent durer les doutes. La perspective du scénique parquet où l’on va inéluctablement s’écraser. Et pourtant, il y a l’objectif qui sauve. Ptitsa stchastia choisit dans l’instant. Pas plus large que le manche à balai. Savoir le titiller de son bec. Provoquer le grand craquement qui d’ordinaire pare les dégels. Ou le début d’une cinquième, chez Mahler ou chez Beethoven. D’autres appelleraient ça l’inspiration. Ptitsa stchastia n’est pas grandiloquent. Son bec est mince. Son message est clair. C’est le glissement du balai ébranlé qui prolonge le voyage. Une arabesque au long d’un pupitre. Le voyage d’un peintre oriental. L’amortissement sur le sac aux habits de scène. A toi de jouer, mec, t’es prêt.
Bien contente de voir un peu Arkhangelsk qu’on ne voit pas du tout dans le merveilleux roman de Simenon, le petit homme d’Arkhangelsk…
Arkhangelsk dont le nom seul me fait grelotter avec ses piquants
je préfère l’arabesque et le sac aux habits de scène