On y accède sur la droite de la maison après avoir monté trois marches. On arrive dans l’allée centrale qui forme une croix avec, au milieu de la parcelle, une perpendiculaire agrémentée de poiriers et de pommiers. De part et d’autre des carrés de plantation légumière, des choux frisés, des pommes de terre, des haricots verts, des tomates et au fond une rangée de groseilliers à maquereau. Le goût acidulé picote l’intérieur de la bouche. Une fois, il nous a pris l’envie de déterrer des pommes de terre et de les jeter au loin sur des cibles invisibles qui sans aucun doute nous auraient terrassés. Elles auraient surgi du sous-bois, attenant à ce vaste potager, lieu de tous nos frissons et aventures.
On se gare sur des emplacements réservés et on chemine dans des sentes bordées d’arbustes. La vue est dégagée et déjà on le sent et déjà on l’entend avec toute la force qu’il peut avoir dans ce coin du monde. Plus on s’approche plus le phare devient net. Ce phare est au milieu du partage de l’océan indien et de l’océan antarctique. Les vagues claquent sur les rochers. L’iode sature l’air alors que la température monte. C’est le plein été et la chaleur distord la vision que l’on a des vagues qui s’échouent avec rage. Les surfeurs vont pouvoir se mesurer. Nous ramassons quelques coquillages et galets dans les retenues d’eau entre les rochers. On s’installe pour admirer, pour écouter ce qu’il nous raconte.
C’est au bout de ce village, qu’on prenait un chemin de terre sur la droite, assez pentu et rempli de nid de poules et de pierres. On slalomait pour les éviter et après quelques frayeurs, on arrivait sur le plateau où l’on pouvait descendre de la voiture et commencer la promenade. Ce jour là nous étions quatre, proches, intimes. Le jour était levé depuis peu et il restait encore dans le ciel ces écharpes roses qu’il aimait tant. Le chemin large au départ montait un peu et nous avions prévu d’aller sur la droite rejoindre un aplomb sur le lit d’une rivière souvent asséchée. Du thym courait parmi les chênes verts et les pins, odorant notre balade. Le chemin se resserrait en sente et nous étions à destination. Au bord, si l’on se penchait, on pouvait voir le lacet de la rivière. Sur la droite des grottes probablement habitées il y a fort longtemps et l’on s’était raconté des inventions sur leur vie. Nous nous sentions seuls au monde et c’était bien comme ça. Assis sur un large rocher nous avions fini par nous taire, buvant par petites gorgées le thé que nous avions apporté dans une thermos, nous passant l’unique tasse à tour de rôle.
Le long d’un aqueduc, il y a une fois par semaine le marché. C’est une grande allée centrale qui se forme avec de chaque côté les commerçants qui se sont vu attribuer une place. On y trouve ces petits fromages de chèvre que l’on aime faire rôtir sur une fine tranche de pain au levain que l’on aurait acheté un peu plus loin. Il y a ce couple, plus tout jeune, qui descend en ville vendre ses légumes qu’ils installent dans de larges paniers. D’autres viennent avec un camion devanture rempli de fromage et autres produits laitiers ou des pates de toutes sortes. Nous arrivons toujours en avant du marché où quelques bouquinistes ont installé leurs tréteaux. Nous fouillons dans leurs caisses et tu achètes souvent un policier qui manque à ta collection.
Tout en bas de cet immense jardin en paliers, après une descente en pente douce, on arrive dans une étendue marquée par des carrés d’herbe séparés par des allées parmi lesquelles on circule sur nos bicyclettes, où on a accroché dans les rayons, à l’aide d’une pince à linge, un bout de carton pour vrombir sur nos pétrolettes improvisées, on dépasse le catalpas dont les fruits en forme de grand haricot vert sur la balance aux plateaux et poids de cuivre deviennent une bonne livre pour madame Michu enveloppée dans du papier journal mis en cône, au pied du sapin surnommé « le secret de Paulette » on jette nos montures, on entre dans le secret où trois gros troncs attendent les plus téméraires, on monte en s’écorchant les jambes et les bras en espérant arriver en premier en haut, le plus haut possible. De là on domine le monde, balancés par le vent, en se demandant si on arrivera à redescendre.
alors là vous me bluffez ! ce phare entre l’océan indien tropical et l’océan antarctique, autour du pole sud alors ? faut que je revoie ma géographie, et j’espère y trouver le plaisir que vous avez à écrire et moi à vous lire. bonne journée; Christiane