Il a trente-six ans au début de la Révolution française. Toute une vie derrière lui déjà. Il est ami de la constitution, républicain, il répond à l’appel de la Patrie en danger. Il a trente-neuf ans, il se fiance à Marie Anne Jeanne Euphémie Reiset qui en a vingt-quatre. Il est grand, il est beau. Sa tête, grosse et carrée, avait pour principal trait caractéristique une énorme et abondante chevelure noire qui lui enveloppait la figure de manière à rappeler parfaitement le général Kléber auquel il ressemblait par la vigueur de son front, par la coupe de son visage, par l’audace tranquille des yeux, et par l’espèce de fougue qu’exprimaient ses traits saillants.Il a quarante-sept ans, il est général en chef de l’armée d’Égypte, abandonnée par Bonaparte. On l’assassine au Caire dans le jardin de son palais.
Il a seize ans. Il s’entôle dans le 1er régiment des hussards, mais sa mère le rappelle; elle veut qu’il fasse des études. Il apprend le dessin. Il a 20 ans, il intègre le cabinet de l’architecte Chalgrin.
Il sera architecte. Architecte sans travail, né pauvre, c’est l’armée bavaroise qui repère ses talents de dessinateur, puis l’armée d’Autriche. Sans naissance, rien à faire, pas de promotion possible. A 24 ans, il ne dépassera pas le grade de sous-lieutenant. Il la quitte et redevient architecte.. il construit des bâtiments et des jardins. Il excelle dans les jardins.
Il a trente-huit ans, il s’engage comme volontaire. Adjudant-major, promu adjudant général chef de brigade, puis général de brigade. Il a quarante ans. Après la capitulation devant Mayence, il sauve de peu sa tête de la guillotine. La Convention l’envoie en Vendée. Il déteste la guerre contre les Vendéens, la répression sauvage. Les représentants du peuple les firent juger par des tribunaux révolutionnaires, et la France, l’Europe entière, connaissent toutes les atrocités qu’on a exercées sur ces misérables. La ville de Nantes a particulièrement servi de théâtre à ces scènes sanglantes et inouïes, que ma plume se refuse de décrire… » C’est un géant qui a mauvais caractère. Claire Lacombe la comédienne révolutionnaire n’est pas insensible à son charme « plus ils ont de talent et plus ils sont dangereux ».De l’armée de l’Ouest, il passe à l’armée du Nord. Il l’emporte à Mayence à quarante-quatre ans, le directoire ne l’aime pas. Il suit Bonaparte en Egypte. Il n’épouse pas Marie Anne Jeanne Euphémie Reiset qui se marie à 50 ans avec un veuf, dix-huit après sa mort. Sa mort embarrasse Napoléon qui s’oppose à des funérailles nationales et à une sépulture en France. Trop républicain pour le désormais premier consul. Le frère de son secrétaire fait don du poignard qui l’a tué au musée de Carcassonne. Il est mort depuis quarante ans, sa dépouille retrouve enfin Strasbourg sa ville natale. Balzac en fait le modèle de son général de Montriveau dans la duchesse de Langeais et Victor Hugo le chante dans les châtiments « Le fer heurtant le fer ; la Marseillaise ailée et volant dans les balles ; les tambours, les obus, les bombes, les cymbales ; Et ton rire, ô Kléber. »
Il est mort depuis cent-quarante ans les occupants allemands déplacent sa dépouille. Après la Libération, la dépouille sera remise dans le caveau de la place Kléber et la statue réinstallée. Il était le plus bel homme de l’armée ; une taille colossale, une figure noble, une force égale à son courage, jointe au génie de la guerre, lui donnait un grand ascendant sur ses camarades.{…} On le retrouvera constamment sur les champs de la gloire, jusqu’à sa mort tragique sur les rives du Nil »