25 juin 2024
Le soleil est long à disparaître en cette saison. Longtemps il traîne, illumine la lisière arborée au-delà de la prairie. Longtemps les animaux furètent. J’attends quelque chose. J’attends. J’attends que la qualité de l’ombre soit suffisante pour relâcher mes nerfs, à moins que ce soit la disparition progressive de la clarté qui me serve de signal. Une histoire de corps, de corps qui guette la venue du noir et la puissance du silence. D’habitude je m’en réfère au chant de la hulotte pour me raccrocher à la régularité de son cri en deux-temps et me rassurer sur l’état du monde, mais ce soir la fatigue est telle que je ne l’entends pas. La hulotte n’est pas là, je me demande ce qu’elle est devenue. Impossible de me fixer sur un livre. Impossible de me couper du spectacle. Les lumières entre douceur et incandescence liées à la chute du soleil s’atténuent rapidement au-dessus du coteau. Bientôt le moment juste, encore ça résiste. Les lueurs frôlent les herbes apaisées et se faufilent sous les branches du grand châtaignier pour agacer les ténèbres amassées au cœur de sa matière tortueuse, un tournant décisif, puis quittent l’espace d’enracinement des branches dans le tronc large, remontent au cœur de l’arbre, allument des mèches furtives dans sa canopée. Temps de regagner la maison. Temps de murmurer, d’oublier les remuements du vivant, de s’abandonner à la nuit. Une histoire de corps qui résiste encore.
C’est beau ce travail sur le déclin de la lumière, l’attente avant l’abandon à la nuit et toujours ce corps qui résiste.
Suis touchée
merci à toi, toujours si bienveillante avec tout le monde et « transmettrice » d’énergie
je prends !
Nos textes sont pleins d’animaux, la nuit certainement. Cette hulotte qui te rassure sur l’état du monde ne serait un peu chamane ?
tu as raison, il y a plein d’animaux
j’ai déjà une souris dans le #3 et maintenant la hulotte
je crois que tu me donnes là une piste !!
merci pour ton passage
« Une histoire de corps, de corps qui guette la venue du noir et la puissance du silence. » La hulotte disparue, son chant disparu et le monde basculé. Toutes les sensations ( et l’inquiétude), l’apaisement des dernières lueurs. Touchée par ces lumières en extinction . Merci
« Temps de regagner la maison. Temps de murmurer, d’oublier les remuements du vivant, de s’abandonner à la nuit ».
Tous ces temps si importants me sont doux à la lecture.
Merci Françoise
tu parles de douceur et il faut y être attentif aussi… on est toujours davantage frappé par la violence ou l’inattendu… mais ce qui est là tapi dans l’herbe tout près, cette brise, ce ciel voilé, dégage une infinie douceur qu’il faut savoir saisir, et durant le crépuscule ça arrive aussi…
merci Marie