Dans la journée qui s’avance l’ordinateur va s’allumer. Un doigt. L’index montre le bouton de droite qu’il frôle et j’attends. Un reflet bleuté sur le bureau entre dans la chambre. Un rais de lumière sépare alors le sol de façon oblique heurtant le lit. L’ombre du mur dans le jardin a mis ses bottes de sept lieues. Plus de soleil sur la sauge. Un insecte, attardé, retardé butine encore, fleurant jusqu’au dernier moment. J’attends encore un peu. Je guette l’heure des geckos. Sortant de façon impromptue ils dessinent sur le mur qui me fait face un labyrinthe dont eux seuls savent sortir. L’ombre du jardin est là, envahissante. Tout au bout, à droite la bande de soleil lutte pour rester jusqu’au dernier moment, le moment où je vais commencer. Je prends le temps de rêvasser. Je regarde l’étagère où un oiseau en céramique était perché. Je l’ai fait tomber. Il est mort. J’attends un tout petit peu. Les gazénias sont déjà fermés au monde des ombres. Le jasmin s’est tu mais un avertissement olfactif m’indique sa présence. Je vais devoir allumer. La pénombre est vivante. Attendre encore. Elle m’a fait sursauter en passant le pas de la porte. Dans la pénombre qui avance à petit pas, je ne l’avais pas vue arriver. Le crépuscule enveloppe les sons.
– Tu m’as fait peur, lui ai-je dit en lui souriant.
– C’est souvent ce que l’on me dit.
– Tu arrives au bon moment, tu vas peut-être pouvoir m’éclairer à propos de la suite que je n’arrive pas à trouver.
– Cela j’en doute fort.
– Oui, mais avec ce que tu as vécu, tu pourrais me mettre sur la piste.
– Quelle piste ? Les pistes s’effacent aussitôt que le vent se lève. Elles peuvent guider les hommes sur la route mais elles peuvent aussi les perdre. Les pistes n’existent que pour faire croire à l’Homme qu’il peut s’orienter et trouver son chemin mais ce chemin-là n’existe pas. Rappelle-toi, un petit souffle et la piste change de sens et voilà l’Homme qui perd le Nord. Lire son chemin dans les étoiles n’est que de l’Histoire ancienne, tu ne seras pas sauvée, le Messie n’existe que si tu y crois. Alors, à toi de le faire vivre. Je peux il est vrai faire un petit tour de piste avec toi. Qu’attends-tu de moi ? Toujours cette histoire qui te hante ? Tu veux encore que j’aille sur ce chemin ? Je sais c’est aussi ton histoire mais c’est surtout avant tout la mienne. Elle sera tienne quand tu auras réussi à l’écrire. A ce moment seulement, tu pourras effectivement te dire que maintenant elle est tienne. En attendant, je la garde encore un peu. Je sais, tu vas encore dire que tu ne sais rien, que tu ne te rappelles même plus du nom de l’homme qui est à l’origine. A l’origine de quoi ? Réfléchis bien à cela. N’oublie pas que la piste que tu vas choisir, c’est toi qui la balises et toi seule.
Je cherchais à lui répondre quelque chose tout en cliquant sur le fichier que je voulais ouvrir. En me retournant, je ne vis que ma chambre plongée complètement dans l’obscurité.
J’aime bien cet appel à l’aide fantomatique pour trouver la suite du texte. Je vais essayer aussi. Au fait, ça a marché ?
Oui, dans la mesure où je pars toujours de quelque chose de connu .