Esther se brosse les cheveux, assise sur sa petite chaise dorée, face à la coiffeuse où repose le grand miroir. Il y a le grand voile posé dessus, le voile bleu en soie qui appartenait à sa mère et c’est peut-être pour ça qu’Esther pense qu’elle voit mal, à cause du flou du voile sur le miroir. Elle se brosse les cheveux sans réellement se regarder, les idées perdues dans le vide, sur les bijoux en vrac sur la coiffeuse et les vêtements en vrac au sol. Elle perd un peu ses cheveux ces derniers temps, elle les prend dans ses doigts dans les pics de la brosse, les froisse un peu, les jette au sol. Elle n’a pas ouvert les grands rideaux, bleus eux aussi, la lumière du jour est tamisée. Elle croise parfois son reflet dans le miroir et quelque chose la dérange, alors elle détourne vite son regard du sien. Elle perd un peu ses cheveux ces derniers temps, elle les prend dans ses doigts dans les pics de la brosse, les froisse un peu, les jette au sol. Derrière son épaule, elle perçoit comme une présence fugace, aux contours floues qui l’a fait sursauter. Elle se retourne sur la fenêtre mais personne. Ridicule. Qui aurait pu être dans la chambre. Son regard croise de nouveau celui dans le miroir et Esther arrête le mouvement de sa brosse. Elle n’ose pas se pencher pour regarder plus en avant, derrière le voile, son reflet qui la regarde. Elle retient sa respiration. La femme dans le miroir ce n’est pas elle. Il n’y a pas une autre femme. Il n’y a pas un autre reflet. Ce n’est juste pas elle.