Photos souvenirs, traces du passé, précieux pour la mémoire, les bébés sur le tapis fourrure, les couples à peine mariés robe blanche costume noir timides ou conquérants, fixés pour l’éternité ou un peu moins puisqu’ils se rangent au fond d’un tiroir, qu’ils jaunissent, vieillissent comme les personnages et se perdent dans les générations. Les familles alignées, assemblées, agrandies année après année, sourire cheese ou larmes déchirantes, exercice impératif, obligatoire qui finit dans des albums reliés et classés. Diapositives, projetées en soirée entre amis, photos de vacances ou documentaires, déjà oubliées, converties, enregistrées dans les programmes photo des ordinateurs. Et si les albums ne sortent pas souvent, on peut les regarder ensemble, les toucher, les passer de main en main, commenter et raconter, alors que les images numériques sont devenues un plaisir solitaire à moins qu’elles ne partent surfer dans le monde. De l’Instamatic qui accompagnait ma mère dans tous ses voyages, à la Leica professionnelle, perfectionnée, irréprochable, les appareils ont souvent dû céder la place aux appareils numériques plus économes en développement, puis enfin, dernière conquête pour l’instant, aux smartphones si pratiques, si légers, si immédiats, collections infinies de toutes sortes de témoignages, et portraits selfie à tout moment pour montrer qu’on y était, relayant ainsi l’Instamatic de ma mère.