#Anthologie#12 A fleur d’eau
lovée dans le Bastion des pêcheurs tout bâti de pierre blanche créneaux rondeurs tourelles à toits coniques de pierre dentelles terrasses comme un château de fée surgit du Moyen Age bien que récent Descendre un des nombreux escaliers vers les rues menant au Danube clouée de stupeur devant la largeur phénoménale du fleuve cette masse d’eau séparant Buda et Pest mais déjà le cœur attaché à Buda cet espace séparant les deux villes ou les réunissant Ce gigantisme des monuments éclairés sur chaque rive fourmillement de bâtiments nobles religieux et profanes Majestueux immeubles de pierre taillées longeant les quais Le pont aux chaînes à deux massifs piliers de pierre pont que nous ne finissons pas de traverser imprégnés de cet air du beau Danube bleu presque désuète cette valse à côté de la placidité du fleuve la puissance du fleuve cette force colossale sous nos pieds à perte de vue notre regard vers la Croatie la Serbie la mer Noire la sensation de se relier à l’Histoire sans rien en savoir
pelouse en bord de mer Baltique champ d’éoliennes multipliées comme des fractales silence et peu de vent les individus sur des vélos les mouettes affairées les allées larges sans arbres puis se rétrécissant vers la terre avec des haies des bosquets toujours des allées sablées fermes et sans nids-de-poule Nos vélos faisant parfois crisser un gravier un fouillis de cours d’eau de petits ponts des maisons surgissant de brassées vertes Maisons de toutes formes bois et hublots métal peint et planches pierre maçonnée toit pentu parallélépipèdes cônes et cubes terre cuite Jardinets de fouillis végétal ou de tonte fraîche les parkings à voitures fait de dalles de granit entre lesquelles poussent l’herbe et les graines de printemps Ici les habitants entretiennent eux-mêmes gèrent eux-mêmes le quartier Frederikshøj construit avec les moyens du bord les inspirations du moment agrandi sans plan seulement par nécessité d’avoir un abri une chambre une salle de bains Des douches froides dans les jardins reliées à des tuyaux Sang viking c’est certain Au loin l’usine à déchets en bord de mer un massif cube de rouille à cheminées fumantes fournissant le quartier en eau chaude et chauffage brûlant les déchets Lacis de sentiers barrières en bois en palettes en fer forgé du rouge du vert pomme du bleu roi Soudain du goudron une avenue un arrêt de bus une place un pub un vide grenier une station de métro toute neuve Mozarts Plads
un pont franchissant l’estuaire vers les docks où l’on fabrique encore du chocolat que l’on déguste sur des tables en bois dans les immenses cours pavées où transitaient aux siècles précédents des marchandises venues d’Amérique et beaucoup de Saint-Domingue cette ville si décriée Il y a eu du commerce d’esclaves elle fut riche et toute construite de pierres de taille ce calcaire à Astéries de l’entre-deux-mers jaune et parfois effrité daté de trente deux millions d’années La terre fabriquait sa pierre la ville en gestation dans la terre doit-on être coupables d’être là d’être au monde à cet endroit Et là le long des docks libre cours à une laborieuse restauration de la nature les joncs protégés par des cannisses les lys jaunes les effluves d’eau saumâtre L’eau de mer remontant jusqu’ici pour embrasser celle du fleuve au loin sur l’autre rive la ville et ses façades nobles ses éclairages dorés là du sable à nos pieds sur le sentier descendant le long de la rive la Gironde allant s’élargissant puis quelques maisons basses de faubourg des guinguettes aux ampoules colorées des tables de récup sur cette rive narguant la richesse du décor d’en face des gens rares et tranquilles parlant dans le soir très loin derrière nous la lumière des trams sur le pont leurs deux wagons articulés trimballant des blocs d’humains dans les deux sens soit vers la lumière soit vers le noir
Belle cette reprise de la ponctuation de la proposition précédente, le même fil, l’eau dans quelques-uns de ses états…
C’est vraiment intéressant ces flots de mots qui nous envahissent. J’aime l’écriture très descriptive qui embarque le lecteur. J’aime. Merci.
Merci à vous Françoise et Jean Luc