#anthologie #11 | Tentative de retour

#Anthologie#11 : Tentative de retour

dans ce retour l’idée de voir ce chemin qu’elle n’a pas pris ce qu’il aurait été si elle l’avait pris Le café à l’angle de la rue de Turenne avec ses tables marbrées cerclées de cuivre disparu Cherchant des yeux les Parisiens du quartier les Italiens les provinciaux les juifs les bourgeois les étudiants les clodos C’est là qu’exceptionnellement elle avait bu un café en terrasse Dans la solennité d’un changement de cap d’un abandon imminent de la capitale pour un lieu indéterminé La rue de Rivoli à cette tombée de la nuit envahie de touristes compressés Les porches toujours là les petits escaliers de la rue Cloche Perce menant au perron d’une copine de lycée Les colonnes Morris curieusement neuves Ce qu’elle aurait été si elle avait pris ce chemin Elle avait étalé sa carte du sud-est pour repérer où se situait Montfavet ville de l’école d’infirmière psychiatrique Cherchant des yeux les Parisiens les femmes avec leur cabas revenant des courses au Prisunic où elle achetait ses petites portions d’étudiante Les lumières du BHV l’attirant encore voir si à l’intérieur toujours les outils le bricolage mais perdue dans des rayons de parfums marques de vêtements et rouges à lèvres Le kiosque de Saint Paul toujours là, son vert bouteille à côté de la bouche de métro vert bouteille Un phare dans la nuit du Marais un roc traversant les années Les nouveaux mendiants du BHV tellement mal en point qu’on se demande avec une honte intérieure s’ils ne simulent pas Elle revient en courant presque vers le kiosque oui mais n’affichant plus Libé ni Charlie mais des tours Eiffel et des foulards dorés Se réfugier dans les rues du Marais cherchant rue de Turenne l’adresse du douze mètres carrés mais ne retrouvant pas Magasin de chaussettes de luxe en bas Errance rue des archives qu’elle ne fréquentait pas pourquoi ? Le mendiant pendant l’averse ni bossu ni claudiquant comptant la recette à l’abri d’un porche de pierre n’ayant lui pas changé Les pavés toujours usés les doux réverbères noyés dans les néons roses Kyrielles d’Asiatiques Kyrielles de trentenaires aisés uniquement occupés de la mise en scène de soi La rue devenue quasi piétonne l’Hôtel de ville avec musique patinoire et projecteurs éblouissants Perdu l’emplacement de ce restau décoré de ballons multicolores où elle dînait d’amour et de fromagée Laissé cet homme sur la route pour chercher mieux bêtement c’est certain La question de savoir si le chemin que l’on n’a pas pris menait à un chemin autre Ce studio perdu dans la nuit perdu le numéro les petits carreaux les grandes fenêtres Etait-ce au premier étage ? Le magasin bazar de vêtements de toutes origines disparu Oui mais ici un petit Charles ici ne serait pas né Ici

A propos de Valérie Mondamert

J'anime des ateliers d'écriture dans les Alpes de Haute-Provence depuis dix huit ans, (DU d'animateur en atelier d'écriture en 2006, à Marseille), je suis prof de musique et je mêle avec joie les deux fonctions. J'ai publié des récits.

4 commentaires à propos de “#anthologie #11 | Tentative de retour”

  1. …. les bouquinistes, un peu plus loin ont réussi à rester, eux. Heureusement. merci pour cette marche vers des lieux devenus presque étrangers…que j’ai bien reconnus! c’est bon même si .. impermanence…

  2. Joie qu’ils soient restés! Bonne nouvelle du matin! Oui, tu (/vous) as le mot: « étranger ». Je ne l’avais pas formulé, même intérieurement. C’est exactement cela. Et cette stupéfaction de l’impermanence. Merci infiniment pour ces mots justes!

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