Je ne connaissais pas le pays au début mais en marchant de nombreux jours j’ai acquis une sorte de connaissance et c’est la curiosité qui m’a conduit jusque-là J’ai traversé des tas de paysages arpenté des chemins faufilés entre les champs de céréales taillé les arbres pris soin des bêtes me suis perdu dans les petites forêts tout ça pour un repas chaud et quelques pièces J’ai fini par me repérer à bien des détails Même la nuit Ce noir particulier l’opaque au-dessus des routes le brillant du givre dans l’herbe brisée même quand il n’y a pas de lune Je me trouve au milieu du temps et je ne sais pas mon âge Je me rends bien compte que je me suis éloigné des villes où il y a trop de misère Encore une fois la nuit est en train d’arriver et elle donne une nouvelle couleur aux choses toutes ces choses qui m’extirpent de mon histoire d’enfant sans que je le désire ou le formule vraiment Peu de points de ralliement dans les bourgs sinon le marché qui se tient certains matins ou la foire trois fois dans l’année Je viens d’arriver dans ce bourg-là et je ressens comme une envie de m’arrêter Je m’assois sur le parvis de l’église dont la masse se cale derrière moi et replace ma veste sur mes épaules à cause du froid qui devient plus intense et me saisit à la nuque Les hauts bâtiments déjà assombris de l’église médiévale et de son cloître proposent protection contre le vent et me donnent de l’espoir De brèves lueurs farandolent contre les murailles de pierre puis s’enfilent dans l’ombre et saisissent les arbres nus d’argent et de bronze Peu de répit pour le corps J’observe les lumières dans les fenêtres des maisons un genre de transition entre la vie et le sommeil et je vois une femme venir vers moi Elle porte des jupons qui dessinent une couronne autour de ses hanches fortes quand elle marche elle vient du cloître elle précipite le pas Ne restez pas là voyons vous allez y laisser la peau venez avec moi il y aura du bouillon chaud à l’intérieur Nous marchons tous les deux l’un derrière l’autre à travers l’espace de terre déjà durcie par le gel dans les dernières lumières du jour avant l’endormissement du monde
6 commentaires à propos de “#anthologie #11 | avant l’endormissement”
Laisser un commentaire
Vous devez vous connecter pour publier un commentaire.
J’ai très envie de suivre l’histoire de ce personnage qui traverse ces paysages qu’il semble apprivoiser. Merci Françoise.
oh ben ça alors, j’ai écrit vite vite mais j’ai ce personnage dans la peau depuis un bon moment et je l’ai repris dans ce cycle, donc ça m’encourage à continuer…
merci Élise
Bravo Françoise, c’est une belle histoire et après si peu de temps passé avec ton héros, il me semble bien le connaitre.
un tout petit bout de l’histoire (déjà évoqué et rejoint dans les # précédentes)
mais alors tu me fais plaisir, parce que franchement j’ai bâclé ce matin pour ne pas prendre de retard, et peut-être là le résultat attendu à suivre ce travail assidument sur 40 jours…
merci Bernard d’être passé…
« Ce noir particulier l’opaque au-dessus des routes le brillant du givre dans l’herbe brisée même quand il n’y a pas de lune » toujours ce talent pour dire le monde dans ces plus beaux détails ! Je vais lire un texte de toi par jour dorénavant c’est décidé ! Bises
ah ah avec joie… mais oui tiens !
et tu trouveras des bribes qui se relient à un roman en cours avec lui Jude, le voyageur qui vient de Silésie, et elle qui habite un domaine de campagne et qui n’a jamais eu de bonheur
et puis tout le reste qui tente de s’organiser, du matériau quoi !
tellement de plaisir d’avoir renoué avec toi… salut cher Camille…