#anthologie #05 | Je m’agite

Je n’ose pas. J’ose pourtant dans ma tête, quand je souris et dis bonjour j’ose en permanence, j’ose fort les aventures que je féconde, mais là, à croire que les autres osent trop, je n’ose plus. Ils arrivent fiers et bruyants, sans doute sont-ils comme moi à faire semblant, sans doute, mais ils ont l’air contents et bruyants. Moi ? À tâtons. Je vais un peu là et puis un peu là. Je voudrais prendre place pardon. Je dis mille choses que personne ne perçoit. Personne ne perçoit personne. On ne perçoit que sa propre bulle. Il est peut-être là mon mystère. Ma bulle plastique. Ma bulle ahurie, infortunée, abondante, déserte et asséchée du désert, bouillante par les feux qui s’y allument, redondante par les rêves et les chutes, vive car à chaque fois, rebondit, rebondit, rebondit. Il y a de moi un être visqueux qui rebondit, qui se colle aux portes et aux murs pour y chercher une meilleure place pour regarder et se faire voir. Se faire voir pour l’amour. Il y a de moi un être qui crie pour qu’on lui réponde « tu es comme nous, nous aussi on crie. » Pourquoi je ne vous entends pas, comme vous ne m’entendez pas ? C’est quoi l’intérêt de crier chacun dans son coin si on s’étouffe ? Ça sert à quoi de se frôler. De se marcher sur un pied. De se cogner dans une porte et avoir mal. Ça sert à quoi de s’en mêler. Je m’agite pour ne pas être engloutie dans le sol. Je m’agite pour me décoller de moi. Je m’agite pour chercher et creuser, la joie quelque part. Je m’agite parce qu’il n’est pas trop tard. Je m’agite parce que je veux plus que crier en silence. Je m’agite pour être vue. Pour exister. À demi jamais. Entièrement et pleinement. Valeur une : la passion. 

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