Je suis né un dimanche. J’ai vu le jour il faisait encore nuit. Je suis né en novembre. Je suis arrivé le premier. J’ai donné congé à un militaire. J’ai vu une femme qui n’avait qu’un bras. J’ai reconnu sa voix. J’ai pleuré. J’ai oublié. J’ai eu peur des vaches et des poules. J’ai eu peur des autres enfants. J’ai eu froid. J’ai senti que plus personne n’était là. Je les ai vus revenir. J’ai voulu aller à pied jusqu’à la ville. Je suis monté sur la moto de l’oncle. J’ai senti des regards posés sur moi. J’ai entendu des adultes qui parlaient fort. J’ai fui. J’ai aimé. Je n’ai rien dit. J’ai couru jusqu’au noyer. Je suis tombé de vélo. J’ai shooté le ballon par-dessus le toit. J’ai été jaloux. J’ai tremblé quand il a fallu écrire. J’ai été assis dans un pré et j’ai eu peur, encore. J’ai entendu des voix qui priaient. J’ai essayé aussi. J’ai fait semblant. J’ai fait ce qu’on m’a dit de faire. J’ai été un petit garçon bien sage. J’ai fait semblant. J’ai compté les voitures qui passaient à la route. J’ai noté les marques. J’ai lu. J’ai lu encore. J’ai chanté. Je n’ai pas osé, souvent. J’ai été en colère, fort. J’ai été mélancolique, le soir. J’ai eu des hauts et des bas.
le texte va au long de ses hauts et ses bas, alternance de désirs et de faux semblant, un battement de coeur,
« J’ai entendu des voix qui priaient. J’ai essayé aussi. J’ai fait semblant. »
Cela me parle.
La chute » j’ai eu des hauts et des bas » , une vraie chute et en même temps il pourrait y avoir une suite
le texte m’émeut : « J’ai donné congé à un militaire « ( ça dit tellement en peu ) la voix reconnue… les vaches et les poules…la peur Les voix celles qui priaient . La mélancolie du soir… Merci
J’adore « j’ai donné congé à un militaire »
Entre effacement et colère, écriture et chant, ce petit discret a tracé son chemin parmi les éclats de voix et les prières, il n’a pas été tenu à tenir les promesses qu’on ne semble pas lui avoir faites malgré un accueil ordinaire. M’intrigue cette femme à un seul bras et ce noyer de secours. Peut-être un changement de milieu ( peur des vaches et des poules) ou en tout cas quelque chose qui rend peureux et jaloux. J’imagine un petit garçon un peu triste qui joue tout seul et collectionne les petites répliques des voitures qu’il voit passer à la fenêtre. Une docilité qui laisse couver une rébellion future ? Les mots des parents manquent dans cette histoire. Il est né… et puis ?
Ca vire, ça volte, comme une course, un texte tout en mouvement.
Chaque phrase comme une claque.