Au départ, je n’étais qu’une cellule. Puis deux, puis quatre. Huit. Seize. J’ai eu une tête. J’ai eu des bras. Des jambes. Des mains. Des doigts.
J’ai remué. J’ai sucé mon pouce. J’ai dormi. J’ai donné des coups de pied. J’ai entendu des voix. J’ai appris des goûts. J’ai dormi. J’ai flotté. Je t’ai donné des coups de pieds. J’ai nagé. J’ai mangé.
Je me suis tournée vers le bas. J’ai senti un changement, un inconfort. Un espace vide. Je suis descendue par un tunnel étroit. On m’a attrapée. J’ai su plus tard qu’on était surpris de me voir. L’air m’a brûlé les poumons. J’ai eu froid et mal aux yeux. J’ai pleuré.
Ai-je entendu que tu pleurais aussi ?
J’ai tété. On m’a pesée. On a trouvé un vêtement pour m’habiller. On m’a mise au chaud. J’ai dormi.
Ai-je remarqué que je n’étais pas seule dans la couveuse ?
J’ai reconnu des voix, des goûts. J’ai vu des formes. J’ai dormi, j’ai bu. On m’a pesée. J’ai grandi. J’ai dormi. J’ai tourné la tête.
Est-ce à ce moment-là que je t’ai vu ?
On s’est adapté. On a tout fait en double. On nous a nourris. On nous a habillés. On nous a changés.
J’ai un jumeau.
Je suis devenue nous.
Ce jeu entre le je, le tu et le nous final, beau… aussi cette façon de faire entrer le tu, lui donner place, par petites touches.
Petite note à part : j’ai une sœur jumelle.
Au plaisir de lire vos prochains textes.
Merci Annick ! J’ai essayé d’écrire ce texte sans parler de mon jumeau, mais c’était impossible.
Merci de nous faire partager cette naissance jumelle ! Beau texte, émouvant aussi.
ce texte est très beau dans sa construction – le jeu des pronom et la révélation de la fin