J’avais l’usage d’une maison d’une seule pièce, sans doute deux, je ne sais plus, ronde. C’était dans le jour et les hautes nuits d’Afrique pas loin de Kafue (l’eau brunie des hippopotames entre les collines pelées). Il y avait divisant son sol de maigre ciment une longue ride peu profonde, une entaille fine, crevée plus en son centre, boursouflée, qu’une herbe obstinée travaillait. Je prenais soin d’elle. En face du lit un bureau que je ne sais plus décrire d’en avoir perdu l’image. Dessus ma machine à écrire portable et les rouleaux en plastique pour le ruban encreur bicolore. Là-bas le noir et ses feux s’allumaient très vite, affranchis de préliminaires. Je m’y cognais comme pousser à deux mains les portes des cathédrales. La nuit collait son ventre derrière la fine moustiquaire trouée de la fenêtre, le toit du ciel émietté brûlait d’étincelles pures et blanches. Alors je m’installais derrière le bureau, j’attendais dans le soir les froissements des bêtes nocturnes, je dépliais les ailes légères de l’aérogramme. J’imaginais les avions soulevés par leurs nuées de papillons bleus – les mots pour se rejoindre irisaient le ciel des continents comme des bulles de savon.
Bonjour Jacques ! J’ ai apprécié la lecture de ce texte plein de poésie et j’en retiens cette phrase qui m’a particulièrement plu : »Là-bas le noir et ses feux s’allumaient très vite, affranchis de préliminaires »
Merci beaucoup du passage !
« Je m’y cognais comme pousser à deux mains les portes des cathédrales. La nuit collait son ventre derrière la fine moustiquaire trouée de la fenêtre, le toit du ciel émietté brûlait d’étincelles pures et blanches »
C’est très beau. Merci
Grand merci à vous !
« aérogramme » ce mot à lui seul raconte tant…
Mais oui ! Absolument ! Ça ouvre d’immenses pistes. Merci !