Le bruit des chantiers à côté a enfin cessé. L’écho des coups de marteaux tapent encore dans le crâne. À moins que ce ne soit les chantiers d’écriture en cours qui commencent à se faire entendre, et écrivent déjà sans moi, alors que je ne me suis pas encore assis à ma table. Je reste debout, à la fenêtre, dans le noir. Je n’allume pas tout de suite. Je n’allume pas de lampe. N’ayant pas de bureau, j’écris souvent dans le noir, avec pour seul lumière celle de l’écran qui éblouit. Je suis rarement seul. Je n’ai pas de lieu pour ma solitude. Je suis toujours accompagné du léger ronflement de T. Toujours obligé d’attendre qu’on s’endorme autour de moi pour que le lieu d’écrire m’ouvre sa porte.. Comme s’il fallait que ça reste secret. Comme si écrire était une infidélité à la vie de famille. Au trentième, je surplombe les lumières de la ville. Les phares des motos en mouvement tracent la cartographie du quartier. Le vague bruit de rues qui remonte mène à une attention flottante, presque distraite. Je plonge dans une attente qui n’attend rien. Puis ce rien formule peu à peu une étrangeté qui donne au quotidien morne l’illusion de servir, servir quoi, l’écriture probablement. Je commence à distinguer des voix. Je ne suis jamais épuisé d’être en moi. Parce qu’il n’y a plus personne à l’intérieur. C’est calme, je ne peux même pas y être seul puisque je n’y suis pas moi-même. Le corps bouge très peu. Juste les mètres qu’il faut pour aller m’asseoir. T. dort profondément. Je suis assez absent pour commencer à écrire.
Beau ce retour sur le moment de l’écriture. Le passage du rien à l’étrange. « Puis ce rien formule peu à peu une étrangeté qui donne au quotidien morne l’illusion de servir ».
Merci Ahn.
Merci pour ce texte. « Je n’ai pas de lieu pour ma solitude » : très bien vu.
Beau texte.
« Je n’ai pas de lieu pour ma solitude. »
« Comme si écrire était une infidélité à la vie de famille. »
« Je suis assez absent pour commencer à écrire. »
Merci.
J’aime le rythme du texte. Et cette attente qui n’attend rien, qui laisse place à l’écriture. « Je suis assez absent pour commencer à écrire. » Merci.